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Ktoś, kiedyś

Po pracowitej nocy lub — wszystko jedno — orgii
ktoś kiedyś zostanie obudzony dzwonkiem
do drzwi. Ze stopami ciężkimi
jak gdyby brodził w wodzie
odbierze przesyłkę za dużą,
aby zmieściła się w skrzynce.
Wierzę, że skrzynki i dzwonki
przetrwają. Na przykład « Antologia
polskiej poezji rytmicznej »,
coś koło tysiąca stron.
I przyrządzając, zależnie od majętności,
pot-pourri z frutti di mare albo grochówkę z proszku
otworzy książkę przypadkiem
akurat na moim wierszu (przypadek to mój jedyny
sprzymierzeniec w niepewnej krainie przyszłości).
Pięć sekund zamyślenia i słabość w ręce kręcącej
łyżką młynki w naczyniu, o ile słabość przetrwa.
« Czytelnik », mój jedyny. I to będzie jedyny
całej tej pisaniny, mówiąc wulgarnie, sens.

Jacek Podsiadło

Un jour, quelqu’un

Après une nuit de travail, ou d’orgie, c’est tout un,
un jour quelqu’un sera réveillé par la sonnette
à la porte. Avec des jambes lourdes
comme s’il marchait dans l’eau
il prendra le colis trop gros pour la boite à lettres.
J’ai confiance : les boites et les sonnettes survivront. Par exemple
« Anthologie de la poésie rythmique polonaise »,
quelque chose de l’ordre de mille pages.
Alors, tout en préparant, au gré de sa richesse,
un pot-pourri de frutti di mare, ou bien une soupe de pois en sachet
il ouvrira le livre au hasard
justement sur mon poème (le hasard est mon unique allié
dans la contrée incertaine du futur).
Cinq secondes pensives et une faiblesse dans la main
qui touille avec la cuillère dans le récipient, si la faiblesse persiste.
Mon unique « lecteur ». Et ce sera l’unique
Sens de tout mon gribouillage, pour parler vulgaire.

trad.Jacques Burko
in 3 poètes polonais, Editions du murmure, 2009

*

Le poète imagine ici les conditions de réception d’un de ses poèmes. Il se pourrait bien sûr que le poème en question soit le poème même qui décrit cette réception, mais Jacek Podsiadło ne s’est pas engagé dans de cette veine auto-référentielle. On peut d’ailleurs se livrer à une brève comparaison avec un exemple d’exploitation de l’auto-référentialité : l’incipit de Si par une nuit d’hiver un voyageur d’Italo Calvino :

  « Tu vas commencer le nouveau roman d’Italo Calvino, « Si par une nuit d’hiver un voyageur ». Détends-toi. Concentre-toi. Ecarte de toi toute autre pensée. Laisse le monde qui t’entoure s’estomper dans le vague. La porte, il vaut mieux la fermer : de l’autre côté, la télévision est toujours allumée. Dis-le tout de suite aux autres : « Non, je ne veux pas regarder la télévision ! » parle plus fort ils ne t’entendent pas : »je lis ! je ne veux pas être dérangé. »
Avec tout ce chahut, ils ne t’ont peut- être pas entendu : dis-le plus fort, crie : » Je commence le nouveau roman d’Italo Calvino ! » Ou, si tu préfère, ne dis rien ; espérons qu’ils te laisseront en paix.
Prends la position la plus confortable : assis, étendu, pelotonné, couché. Couché sur le dos, sur un côté, sur le ventre. Dans un fauteuil, un sofa, un fauteuil à bascule, une chaise longue, un pouf. Ou dans un hamac, si tu en as un. Sur ton lit naturellement, ou dedans. Tu peux aussi te mettre la tête en bas, en position yoga. En tenant le livre à l’envers, évidemment. »

Alors que Calvino interpelle son lecteur pour évoquer les conditions de sa lecture de l’ouvrage même qu’il a entre les mains, Podsiadło évoque en 3e personne un lecteur éventuel d’un de ses poèmes ; le lecteur dont il nous parle pourrait être nous-même, mais comme, à la différence de Calvino, il ne nous interpelle pas, il semble parler de nous comme si nous n’étions pas là.

On peut également s’interroger sur une bizarrerie du poème de Podsiadło : il qualifie d’unique lecteur, une personne qui découvrirait son poème en ouvrant au hasard une Anthologie de la poésie rythmique polonaise d’un millier de pages, pourtant la présence du poème dans l’anthologie suppose elle-même un autre lecteur qui ait trouvé le poème suffisamment digne d’intérêt.