Petit rappel à tous les professeurs qui faisaient aujourd’hui leur pré-rentrée.
Dans ces moments où il vous semble que vous intéressez vos élèves, n’oubliez pas que leur satisfaction aurait été plus grande encore si on leur avait annoncé votre absence.
Da ich weiß, Du kommst mir wieder Machen mich die Wolken froh, Und am Georginenbeete Abendstille freut mich so!
Fröhlich such ich mir den Schatten, Bis die Sonne fast versinkt. Nachts im kleinen dunkeln Tale Freut mich jedes Licht, das blinkt …
Ob ich einsam steig am Hügel, Horch ich doch an Deiner Türe. Steh ich hier in fremdem Garten, Du doch bist es, die ich spüre!
Hugo von Hofmannstahl
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Puisque je sais …
Puisque je sais que tu vas me revenir,
Je suis heureux en contemplant les nuages,
Et le long des parterres de dahlias,
Le calme du soir m’emplit de joie!
Je ris de chercher ma propre ombre
Jusqu’à l’heure où le soleil a disparu,
Et la nuit, chaque lumière qui scintille
M’emplit de joie, là-bas dans la vallée obscure …
Bien que je monte seul sur la colline,
Je colle mon oreille à la porte
Et ici, dans ce jardin étranger,
C’est toi dont je sens la présence !
« Quand j’observe ces hommes qui mettent toute leur application à un ouvrage, cela me fait penser à ceux qui voudraient essayer de faire une statue de Bouddha en neige, par un jour de printemps, qui la pareraient d’ornements, d’or, d’argent, de perles et de pierreries, et qui construiraient un sanctuaire dans l’espoir d’y abriter l’image.
On se croit toujours vivant, alors que notre vie éphémère est semblable à la neige qui fond de l’intérieur sans qu’on s’en aperçoive. Et cependant, combien de résultats n’attendons-nous pas, en nous entêtant dans notre vaine assiduité. »
L’habitude en matière de relation de couple a particulièrement mauvaise presse : elle est couramment présentée comme le prototype du lien inauthentique qui permettrait une survie artificielle du couple par delà le dépérissement du lien passionnel considéré comme le seul lien amoureux authentique. Je crois que j’ai toujours trouvé cette vision des choses caricaturale, et à la plus fameuse chanson de Cloclo je préfère ce chef d’œuvre d’Otis Redding.
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C’est avec joie que j’ai découvert chez Gogol une défense de l’habitude. Dans la nouvelle Un ménage d’autrefois, incluse dans le recueil Mirgorod, il met en scène le vieux couple que forme Athanase Ivanovitch et Pulchérie Ivanovna. L’épouse meurt la première, le narrateur rend visite à Athanase cinq ans après la perte de sa femme :
» Mon Dieu, me dis-je en le regardant, cinq années ont passé, cinq années de cet universel exterminateur qu’est le temps, et ce vieillard déjà glacé, ce vieillard à qui la vie semblait avoir épargné toute émotion forte, ne lui réservant que de longues séances dans un bon fauteuil, des anecdotes sans malice, des régals de poire tapée et de poisson fumés – ce vieillard est encore déchiré par une affliction sans merci. Qui donc, de la passion ou de l’habitude, a sur nous le plus d’empire? Ou peut-être nos désirs, nos ardeurs, nos ivresses ne sont ils qu’un apanage de notre belle saison, peut être notre seule jeunesse nous fait elle croire ce tourbillon irrésistible? » Quoiqu’il en soit, toutes nos passions me parurent en ce moment de purs enfantillages comparées à cette longue, à cette lente, à cette quasi inconsciente habitude.
N. Gogol, Un ménage d’autrefois, in Nouvelles complètes, Quarto, p. 341-342
Pour illustrer l’idée qu’on se console plus facilement de la rupture d’un lien purement passionnel que d’un lien ancré dans des habitudes, Gogol met en contraste l’histoire d’Athanase Ivanovitch et d’une anecdote mettant en scène la capacité du temps à emporter les plus grandes détresses passionnelles. Cette histoire dans l’histoire est tout à fait remarquable, malheureusement pour vous mes chers lecteurs j’ai la flemme de vous la recopier. Vous savez ce qui vous reste à faire.
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Si vous souhaitez pouvoir dire : « je n’ai pas lu le livre, mais j’ai vu le film… »
« Ne dis pas qu’il est trop tard pour ceci ou cela, va savoir s’il ne te reste pas encore trente ans pour recommencer une nouvelle vie. Ne dis pas qu’il est trop tôt pour ceci ou cela, va savoir si tu ne seras pas mort dans un mois, alors de tes décombres mêmes d’autres pourraient tirer de la vie. »
Dans la lutte implacable de l’homme et de son temps Dans la mécanique sévère le cylindre affamé et la bielle bleue des croisières L’homme né vigoureux progresse au gré du vent
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Pierre Reverdy, Sur les routes de fer et de lumière
in La guitare endormie (1919)