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« De tous les animaux qui n’ont cessé d’habiter l’homme comme une arche vivante, l’oiseau, à très longs cris, par son incitation au vol, fut seul à doter l’homme d’une audace nouvelle. »
Saint-John Perse, Oiseaux IX
30 mercredi Sep 2015
Posted Divers vers
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« De tous les animaux qui n’ont cessé d’habiter l’homme comme une arche vivante, l’oiseau, à très longs cris, par son incitation au vol, fut seul à doter l’homme d’une audace nouvelle. »
Saint-John Perse, Oiseaux IX
29 mardi Sep 2015
Posted Fantaisie, SIWOTI or elsewhere
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» James réplique à Clifford que nous ne savons réellement que de façon tout à fait exceptionnelle pourquoi au juste nous croyons ce que nous croyons, même quand il s’agit de croyances réputées scientifiques, autrement dit, de l’espèce en principe la plus honnête que l’on puisse concevoir. Orwell cite, à ce propos, une affirmation pour le moins déconcertante de Bernard Shaw : « Bernard Shaw fait observer quelque part – je crois que c’est dans sa préface à Saint Joan – que nous sommes aujourd’hui plus crédules et superstitieux qu’au Moyen-Age, et il donne en exemple de la crédulité moderne la croyance largement répandue selon laquelle la terre est ronde. L’homme ordinaire ne peut, selon Shaw, avancer un seul argument en faveur de la rotondité de la terre. Il ne fait sienne cette théorie que parce qu’il y a quelque chose en elle qui séduit la mentalité du XXe siècle. »
Jacques Bouveresse, Peut-on ne pas croire? p. 93 -94
Je ne sais pas s’il est vrai que l’homme ordinaire ne peut, comme le soutient Shaw, avancer le moindre argument en faveur de la rotondité de la terre [1], mais je sais que l’homme cinglé peut lui avancer 200 preuves que la Terre est plate [2].
[1] En fait je pense que l’affirmation de Shaw est aujourd’hui tout simplement fausse.
[2] J’ai découvert ce site, qui ne semble pas être une parodie (ou alors il y a des gens qui ont beaucoup de temps à consacrer à ce genre d’exercice de style !) grâce au Slate Star codex. L’auteur de The atlantean conspiracy ne croit, évidemment, pas non plus aux dinosaures. Là vous vous dites que ça doit être une sorte de créationniste extrémiste (plus radical encore que le young earth creationism, le flat earth creationism) … et bien c’est plus compliqué que ça, parce qu’il semble que pour lui, le christianisme aussi soit le produit d’un complot.
28 lundi Sep 2015
Posted Divers vers
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27 dimanche Sep 2015
Posted Fantaisie, SIWOTI or elsewhere
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absurdité, grande cause nationale, indignation, stupidité, SVT
Comme le disait Schopenhauer, « c’est la connaissance des choses de la mort et la considération de la douleur et de la misère de la vie, qui donnent la plus forte impulsion à la pensée philosophique et à l’explication métaphysique du monde ». Il est cependant des absurdités de moindre portée dans notre existence qui n’en donnent pas moins le vertige.
Pourquoi ?
Pourquoi ? je vous le demande mes chers lecteurs.
Pourquoi ? éclaire moi, ô Dieu omniscient !
Pourquoi certaines personnes, parfois estimables par ailleurs, s’acharnent-elles à traduire l’acronyme SVT, en usage dans l’enseignement secondaire, par l’expression « sciences et vie de la terre », ce qui ne veut rien dire, au lieu d’utiliser l’expression correcte « sciences de la vie et de la terre », qui désigne parfaitement son objet : la biologie et la géologie ? L’usage de l’expression fautive exprime-t-il une adhésion à l’hypothèse Gaïa ? s’explique-t-il par un effet d’attraction du titre du magazine Sciences et vie.
Toujours est-il, mes chers lecteurs, qu’il est de notre devoir de nous opposer à cette aberration. Je vous invite à faire comme moi, la prochaine fois que quelqu’un dira « science et vie de la terre », éclatez d’une indignation qui pétrifie d’effroi l’assistance. Peut-être, ainsi, pourrons nous ramener un peu d’ordre dans le chaos du monde.
26 samedi Sep 2015
Posted Divers vers, Pessoa est grand
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Pouco me importa.
Pouco me importa o quê? Não sei: pouco me importa.
Fernando Pessoa, Poemas Inconjuntos
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Peu m’importe.
Peu m’importe quoi ? Je ne sais pas : peu m’importe.
trad. Chandeigne, Quillier, camara Manuel
Poèmes désassemblés, in Poèmes païens (Christian Bourgois)
25 vendredi Sep 2015
Posted Lectures
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Pour revenir sur une question évoquée en janvier :
« Il est vrai qu’il y a à première vue la plus grande différence entre sympathiser avec toutes les formes de croyances possibles et sympathiser avec toutes les formes de croyants possibles. On peut avoir envers un être humain, quel qu’il soit, des obligations que l’on n’a pas nécessairement envers les opinions et les convictions qu’il professe. Mais je dois avouer que je vois mal comment on pourrait être tenu d’avoir de la considération pour tous les types de croyants imaginables si l’on n’est pas tenu, en fin de compte, d’en avoir également pour toutes les formes de croyances concevables. »
Jacques Bouveresse, Peut-on ne pas croire ?, Agone p. 70
24 jeudi Sep 2015
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« Descartes semble vouloir dérober son secret à la divinité, comme on dit que Prométhée déroba aux dieux le feu du ciel afin d’introduire et de multiplier les arts sur la terre. Cela est si vrai qu’une hypothèse à l’aide de laquelle on peut arriver à ce but, lui parait de son propre aveu aussi utile, aussi belle et aussi précieuse que la vérité même. Voyez ce qu’il dit dans ses Principes. »
Joseph Joubert, 10 mars 1800, Carnets I, p.343
*
Je ne sais pas si Joubert est le premier à avoir fait ce rapprochement, mais il est certain qu’il n’est pas le dernier. On pense évidemment à ce passage de la VIe partie du Discours de la méthode auquel ne doit échapper aucun élève de terminale :
« Car elles [les notions de physique qu’il a découvertes] m’ont fait voir qu’il est possible de parvenir à des connaissances qui soient fort utiles à la vie, et qu’au lieu de cette philosophie spéculative, qu’on enseigne dans les écoles, on peut en trouver une pratique, par laquelle connaissant la force et les actions du feu, de l’eau, de l’air, des astres, des cieux et de tous les autres corps qui nous environnent, aussi distinctement que nous connaissons les divers métiers de nos artisans, nous les pourrions employer en même façon à tous les usages auxquels ils sont propres et ainsi nous rendre comme maîtres et possesseurs de la nature.«
Quant au texte auquel Joubert fait référence il s’agit vraisemblablement de cet extrait du §. 204 de la Quatrième partie des Principes de philosophie où Descartes propose une solution qu’on est tenté de qualifier de pragmatiste au problème de la sous détermination empirique des théories.
« On répliquera peut-être encore ceci que, bien que j’aie peut-être imaginé des causes qui pourraient produire des effets semblables à ceux que nous voyons, nous ne devons pas pour cela conclure que ceux que nous voyons soient produits par elles, parce que, comme un horloger industrieux peut faire deux montres qui marquent les heures en mêmes façon, et entre elles il n’y ait aucune différence en ce qui paraît à l’extérieur, qui n’aient toutefois rien de semblable en la composition de leurs roues, ainsi il est certain que Dieu a une infinité de divers moyens par chacun desquels il peut avoir fait que toutes les choses de ce monde paraissent telles que maintenant elles paraissent, sans qu’il soit possible à l’esprit humain de connaître lequel de tous ces moyens il a voulu employer à les faire, ce que je ne fais aucune difficulté à accorder. Et je croirai avoir assez fait si les causes que j’aie expliquées sont telles que tous les effets qu’elles peuvent produire se trouvent semblable à ceux que nous voyons dans le monde, sans m’informer si c’est par elles ou par d’autres qu’ils sont produits. Même je crois qu’il est aussi utile pour la vie de connaître des causes ainsi imaginées que si on avait la connaissance des vraies ; car la médecine, les mécaniques, et généralement tous les arts à quoi la connaissance de la physique peut servir, n’ont pour fin que d’appliquer tellement quelques corps sensibles les uns aux autres que, par la suite des causes naturelles, quelques effets sensibles soient produits ; ce que l’on pourra faire tout aussi bien en considérant la suite de quelques causes ainsi imaginées , quoique fausses, que si elles étaient les vraies, puisque cette suite est supposée semblable en ce qui regarde les effets sensibles. »
Ce qu’il est amusant de constater, si, avec Joubert, on considère ce texte comme une illustration du prométhéisme cartésien, c’est qu’en réalité Descartes nous explique ici qu’il n’est pas nécessaire de voler le véritable secret de Dieu pour permettre aux hommes de « multiplier les arts sur la terre ». Le Prométhée cartésien ne pénètre pas dans la demeure divine, il pratique une forme d’espionnage industriel qui se contente finalement des données publiques. D’un autre côté, pourrait-on dire, si cela suffit, c’est peut-être parce que ce Dieu vérace est bien accommodant.
23 mercredi Sep 2015
Posted SIWOTI or elsewhere
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Mon article de samedi dernier raillant les dénonciateurs de l’appropriation culturelle ayant attiré un flux inhabituel de visiteurs sur ce blog qui ne doit pas avoir plus de 5 lecteurs réguliers, j’ai décidé d’exploiter sans vergogne ce filon. J’évoquerai aujourd’hui les trigger warnings (une définition précédée d’un trigger warning). Depuis quelques temps on voit se multiplier les articles d’universitaires américains en réaction à la montée de revendications d’étudiants à ce sujet. Via le blog de Brian Leiter, j’ai découvert cet article de Greg Lukianoff et Jonathan Haidt dont je recommande la lecture et dont je vais citer quelques éléments.
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Lukianoff et Haidt signalent plaisamment un phénomène de « serpent qui se mord la queue » :
« Some recent campus actions border on the surreal. In April, at Brandeis University, the Asian American student association sought to raise awareness of microaggressions against Asians through an installation on the steps of an academic hall. The installation gave examples of microaggressions such as “Aren’t you supposed to be good at math?” and “I’m colorblind! I don’t see race.” But a backlash arose among other Asian American students, who felt that the display itself was a microaggression. The association removed the installation, and its president wrote an e-mail to the entire student body apologizing to anyone who was “triggered or hurt by the content of the microaggressions.” »
Mais ce n’est pas la première fois que le serpent se mord la queue : il semble en effet que certaines personnes trouvent que l’expression « trigger warning » pourrait elle même être source de traumatisme (raison pour laquelle « content warning » est parfois préféré à « trigger warning » – lire « l’editors note »).
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Lorsque les auteurs de l’article évoquent Socrate :
« There’s a saying common in education circles: Don’t teach students what to think; teach them how to think. The idea goes back at least as far as Socrates. Today, what we call the Socratic method is a way of teaching that fosters critical thinking, in part by encouraging students to question their own unexamined beliefs, as well as the received wisdom of those around them. Such questioning sometimes leads to discomfort, and even to anger, on the way to understanding. »
on se dit qu’aujourd’hui Anytos et Mélétos ne l’accuseraient pas de corrompre la jeunesse, mais de la traumatiser par sa méthode apparentée à la torture.
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Une des questions qui se pose à propos des trigger warnings est celle des limites dans lesquelles ils pourraient être légitimement réclamés. Est ce que toute personne peut revendiquer le droit d’être protégé contre des contenus susceptibles de la perturber ? La droite religieuse américaine doit elle se rallier aux Trigger warnings pour protéger ses enfants de Darwin ? Les homophobes peuvent-ils réclamer de ne pas être mis en contact de contenus susceptibles de les perturber? Je doute que les défenseurs habituels des TW concèdent cela.
22 mardi Sep 2015
Posted Food for thought
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amitié, conversation, Descartes, lectures, Sénèque, Urabe Kenkô
« que la lecture de tous les bons livres est comme une conversation avec les plus honnêtes gens des siècles passés, qui en ont été les auteurs, et même une conversation étudiée, en laquelle ils ne nous découvrent que les meilleures de leurs pensées »
René Descartes, Discours de la méthode, première partie
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« Solitaire sous la lampe, c’est une joie incomparable de se faire des amis avec les hommes d’un passé que je n’ai point connu. »
Urabe Kenkô, Les heures oisives XIII, trad. C. Grosbois et T. Yoshida
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« Nous pensons, quoique nous en disions, que seuls s’attardent à leurs véritables devoirs, les hommes qui tous les jours, voudront avoir Zénon, Pythagore, Démocrite, tous les prêtres de la science du bien, Aristote, Théophraste, comme amis intimes. Aucun d’eux ne sera occupé, aucun ne renverra un visiteur sans qu’il soit plus heureux, plus ardent à l’aimer, aucun ne le laissera partir les mains vides. De nuit comme de jour, tous les mortels peuvent aller les trouver. »
Sénèque, De la brièveté de la vie, XIV, 5, tra. J. Kany-Turpin (GF)
21 lundi Sep 2015
Posted Fantaisie
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« Ulrich avait été subjugué par l’extravagance de la main féminine, cet organe somme toute indécent qui, comme la queue des chiens, touche à tout, mais n’en est pas moins officiellement le siège de la fidélité, de la noblesse et de la tendresse. »
Robert Musil, L’homme sans qualités, Seuil, trad. Jaccottet, p. 116