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Pater Taciturnus

~ "Ton péché originel c'est d'ouvrir la bouche. Tant que tu écoutes tu restes sans tache"

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Archives de Tag: féminisme

Lichtenberg féministe

21 mardi Déc 2021

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beauté, féminisme, Lichtenberg

« En ce monde, les hommes sont redevables de nombreuses et singulières trouvailles poétiques à leur instinct de reproduction, – on pensera ici, entre autres, à la jeune femme idéale. Il est dommage que les filles enflammées ne puissent écrire sur les beaux jeunes gens, comme elles le feraient bien si on le leur permettait. La beauté masculine n’a pas encore été peinte par de telles mains ; qui, seules, eussent pu la peindre avec une passion véritable. L’esprit qu’un regard fasciné découvre dans un corps qui l’a charmé se montre vraisemblablement d’une tout autre manière pour une jeune femme regardant un corps masculin, qu’il ne se découvre, pour un jouvenceau, à travers celui d’une femme. »

Lichtenberg, Le miroir de l’âme [A 139]

Féminisme de combat

17 mercredi Mar 2021

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duel, féminisme, virginité

Au détour de recherches pour un cours d’EMC je suis tombé sur cette étonnante anecdote au fin fond de l’article de Wikipedia sur le duel :

« Plus en accord avec la tradition de duel pour motifs idéologiques et politiques de la seconde moitié du XIXe siècle et du début du XXe, en juin 1911, la journaliste et militante féministe Arria Ly (de son vrai nom Joséphine Gourdon), collaboratrice régulière du Rappel de Toulouse, publie dans la revue Rénovation Morale un article défendant ses conceptions assez extrêmes du combat féministe (virginité militante et création d’un service militaire féminin), ce qui lui vaut de se faire accuser de lesbianisme par le rédacteur en chef de La Dépêche de Toulouse, nommé Prudent Massat. Elle le provoque en duel en lui envoyant deux témoins (deux femmes). Arria Ly n’en est pas à son coup d’essai : en 1904, elle a déjà affronté en duel un médecin, le Dr Girard, qu’elle accusait d’avoir provoqué la mort de son père par incompétence professionnelle… et lui a tranché la moitié d’une oreille d’un coup de taille. Lâcheté ou conception personnelle de la galanterie, Massat refuse de se battre en duel avec une femme… mais se déclare prêt à affronter un chevalier servant. L’affaire fera grand bruit dans la presse et à défaut de se terminer par un duel, elle provoquera un débat sur les limites du combat féministe. »

J’ignorais qu’un siècle avant le lesbianisme politique il avait existé une virginité militante (d’ailleurs soupçonnée d’être du lesbianisme).

Si vous voulez en savoir plus sur cette histoire, un article substantiel a été consacré à Arria Ly par Andrea Mansker.

Mademoiselle Arria Ly Wants Blood!” The New Woman and the Debate over  Female Honor | SpringerLink

Vleben féministe ?

30 mercredi Déc 2020

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féminisme, Thorstein Vleben, travail

« Reculons d’un degré encore et quittons cette civilisation exemplaire. Les stades inférieurs de la barbarie ne présentent plus de classe oisive accomplie, mais nous offrent les usages, les motifs et les conditions dont l’institu­tion est sortie, et nous indiquent les premiers degrés de sa croissance. Dans diverses parties du monde, nous trouvons l’exemple de ces phases plus primitives de la différenciation. L’une quelconque des tribus de chasseurs nomades de l’Amérique du Nord peut servir d’illustration convenable. C’est à peine si l’on peut dire qu’une classe désœuvrée y existe. On y voit des différences de fonction et une distinction des classes fondée sur ces différences, mais l’exemption du travail n’est pas assez poussée pour qu’on puisse dire de la haute classe qu’elle mérite le nom de « classe d’oisifs ». A ce niveau, la différenciation économique en est au point où l’on distingue nettement les activités de l’homme et, celles de la femme, à qui cette distinction est défavorable. Dans presque toutes ces tribus, un usage tourné en coutume maintient les femmes dans les rôles d’où proviennent, au stade suivant, les métiers d’industrie proprement dits. Les hommes, dispensés de ces tâches vulgaires, se réservent pour la guerre, la chasse, les sports et la pratique religieuse. Dans ces domaines, la discrimina­tion est ordinairement très méticuleuse.

Cette division du travail coïncide avec la distinction de la classe travailleuse et de la classe oisive, telle qu’elle apparaît dans la haute civilisation barbare. Au fur et à mesure que les travaux se diversifient et se spécialisent, la ligne de démarcation ainsi tracée en vient à séparer les fonctions industrielles des non industrielles. L’activité de l’homme, telle qu’elle se présente au stade précédent de l’état barbare, n’est pas l’origine dont est provenue une part appréciable de l’industrie ultérieure. Cette activité masculine survivra dans les seules fonctions qui ne sont pas classées comme industrielles, comme la guerre, la politique, les sports, l’étude, le sacerdoce. Seules exceptions remar­quables : la pêche, dans une certaine mesure, et quelques travaux mineurs que l’on hésite à ranger parmi les industries, comme la fabrication des armes, des jouets et des accessoires sportifs. Virtuellement, le domaine entier des métiers d’industrie est une suite naturelle des travaux que la communauté barbare primitive classe comme féminins.

Dans cette barbarie inférieure, le travail des hommes n’est pas moins indispensable à la vie du groupe que celui des femmes. Il peut même se faire que l’ouvrage des hommes contribue tout autant à la nourriture et aux autres fournitures indispensables. L’aspect « productif » du travail masculin est même si évident que dans les écrits des économistes classiques, la peine du chasseur est présentée comme le type de l’industrie primitive. Tel n’est pourtant pas le sentiment du barbare. Il ne se tient pas pour un travailleur, et à ce point de vue on ne saurait le ranger avec les femmes ; il ne faut, pas, sous peine de confusion, classer son effort avec l’ingrate besogne des femmes, comme travail ou industrie ; ainsi, dans toutes les communautés barbares, on ressent profondément l’inégalité des travaux masculins et féminins. Le travail de l’homme peut contribuer à la maintenance du groupe ; mais l’on sent bien qu’il le fait grâce à une excellence, une efficacité particulières, que l’on ne saurait, sans les déprécier, comparer avec l’uniforme assiduité féminine. »

Thorstein Vleben, Théorie de la classe de loisir, Gallimard Tel, p . 4 – 6

Petits garçons devenus grands

21 mardi Jan 2020

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féminisme, George Makari, Karen Horney, Sigmund Freud

Grâce à Revolution in mind, la très recommandable histoire de la psychanalyse écrite par George Makari, je découvre l’existence de Karen Horney, une psychanalyste allemande  (« arguably the first great female psychoanalytic theoretician ») qui a semble-t-il inauguré  la critique féministe des théories freudiennes, en particulier de la fameuse (et fumeuse) « envie du pénis ».

« In this formulation we have it assumed as an axiomatic fact that females feel at a disadvantage in this respect of their genital organs, without being regarded as constituting a problem in itself—possibly because to masculine narcissism this has seemed too self-evident to need explanation. Nevertheless, the conclusion so far drawn from the investigations—amounting as it does to an assertion that one-half of the human race is discontented with the sex assigned to it and can overcome this discontent only in favorable circumstances—is decidedly unsatisfying, not only to feminine narcissism but also to biological science. »

Karen Horney, On the Genesis of the Castration Complex in Women

J’aime particulièrement ce passage qui se situe à al fin des quelques pages que George Makari consacre à Karen Horney :

« She openly stated that the entire edifice of psychoanalytic theory had tended to neglect female psychology, since its theoreticians were male. Horney bluntly compared the fantasies of little boys about girls with psychoanalytic theories of feminine development and concluded there was little difference. »

George Makari,  Revolution in Mind, HarperCollins, p.381

Au temps de l’éternel féminin

19 vendredi Juil 2019

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essentialisme, féminisme, Karen Blixen

« Vous, jeunes gens, qui riez des idées comme des tournures des années soixante-dix [1870], vous me direz sans doute qu’en dépit de tous ces artifices [les corsets], à la longue, il ne devait pas subsister grand-chose du mystère. Mais je me permettrai de vous faire remarquer qu’il ne vous est guère possible aujourd’hui de saisir toute la signification du mot. Rien n’est vraiment mystère avant d’être devenu symbole. Le pain consacré par l’Eglise est cuit, lui aussi, de même que le vin a été mis en bouteilles, n’est-ce pas ? Les femmes de cette époque représentaient bien davantage qu’un groupe d’indivi­dus. Elles symbolisaient et représentaient la Femme. Je sais que le mot lui-même, dans ce sens-là, a disparu du vocabulaire. Là où nous parlions de la Femme — de façon gentiment cynique — vous parlez des femmes. Voilà toute la différence. Vous souvenez-vous des clercs du Moyen Age qui discutaient si c’est l’idée du chien ou le chien lui-même qui a été créé le premier? Pour vous, à qui l’on enseigne la statistique dès l’école maternelle, je présume que la réponse va de soi; et l’on doit reconnaître qu’en effet votre monde actuel semble bien être le résultat d’une suite d’expérimentations. Mais pour nous, les idées de ce brave monsieur Darwin furent déjà une étrange nouveauté. Notre propre conception du monde, nous l’avions puisée dans les symphonies, les cérémonies de la cour et autres choses de cet ordre; et nous avions été élevés dans l’idée qu’il existe une différence profonde entre naissance légitime et illégitime. Nous ne doutions pas des causes finales. L’idée de la Femme — d’une das ewig weibliche, qui implique, vous le reconnaîtrez vous-même, un certain mystère, remonte pour nous aux origines de la création, et les femmes de mon temps considéraient que c’était leur devoir sacré d’incarner dignement cette idée, exactement comme le devoir sacré du chien en tant qu’individu a été, je l’imagine bien, d’incarner dignement l’idée du chien selon son créateur.
« On pouvait alors suivre le cheminement de cette idée de la Femme dans l’esprit d’une petite fille, au fur et à mesure qu’elle grandissait, qu’elle était peu à peu, et sans doute selon des règles très anciennes, initiée aux rites du culte, avant d’en être ordonnée prêtresse. Lentement, le centre de gravité de son être se déplaçait, elle perdait de son individualité pour devenir symbole, jusqu’au moment où l’on se trouvait confronté à cette fierté et à cette réserve que l’on rencontre chez les êtres qui détiennent un grand pouvoir, les très grands artistes par exemple. En effet, l’arrogance de la jolie jeune femme ou la majesté de la vieille dame n’était pas plus affaire de vanité personnelle, ni d’aucun sentiment analogue, que la fierté d’un Michel-Ange ou d’un ambassadeur d’Espagne à Paris. Quelles qu’aient pu être les huées d’indignation par lesquelles don Juan fut accueilli sur les bords du Styx par ses victimes échevelées, les seins nus, un jury de femmes de mon temps l’eût acquitté pour sa dévotion à l’idée de la Féminité. Mais, d’accord en cela avec les maîtres d’Oxford, elles eussent condamné Shelley pour son athéisme. Elles sont même parvenues à subjuguer le Christ en personne, en le montrant toujours comme un petit enfant dans les bras de la Vierge, dépendant d’elle. »

Karen Blixen, Le vieux chevalier errant, in Sept contes gothiques, p. 125 – 126

Possibilité d’un envol

14 dimanche Juil 2019

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anges ou sorcières, féminisme, Karen Blixen

« Oui continua-t-il [l’évêque de Seeland] avec chaleur, les qualités particulièrement angéliques, que nous admirons et adorons chez la femme, sont justement celles qui la retiennent à terre.Les longues boucles, les voiles pudiques, les chastes plis de ses vêtements et même les courbes adorables du corps féminin s’opposent à l’idée d’une fuite. Tous, nous sommes prêts à conférer le titre d’ange et le bel emblème des ailes à la femme, mais à la condition expresse qu’elle ne puisse jamais rêver d’un envol, et soit même élevée dans l’ignorance totale de sa possibilité.

-Oh! là! là! s’exclama Fanny. Nous le savons, Éminence, et c’est pourquoi c’est toujours la femme dépourvu de belles boucles et d’une riche poitrine, celle que les messieurs n’aime pas et qui doit trousser ses jupes pour laver le parquet, qui se délecte à la vue de son emblème de servitude et qui enfourche le manche à balai la nuit de la Saint-Jean. »

Karen Blixen, La soirée d’Elseneur, in Contes gothiques

Anti-nazi ou misogyne ?

16 samedi Mar 2019

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féminisme, Leni Riefenstahl, Lilian Auzas, misogynie, nazisme

Ayant récemment eu à faire des recherches sur l’art nazi, j’ai lu La Trilogie de Nuremberg de Lilian Auzas. L’auteur qui a précédemment écrit une biographie de Leni Riefenstahl se focalise sur trois films tournés par la réalisatrice entre 1933 et 1935 : le premier des films de la trilogie est Triomphe de la foi un film consacré au congrès nazi de Nuremberg en 1933, celui de 1934 fait l’objet du second volet : le célèbre Triomphe de la volonté, le troisième film est Jour de liberté, un court-métrage de 1935 à la gloire de la Wehrmacht.

L’ouvrage ne développe pas autant que je l’espérais l’analyse esthétique des  productions de Riefenstahl et de leurs relations avec l’idéologie nazie, il est cependant intéressant par ce qu’il raconte de la manière dont Riefenstahl s’est fait une place dans le système établi  à partir de 1933. J’ai ainsi eu la surprise de découvrir que, dans le panier de crabes nazi, des rivaux de la réalisatrice avait fait courir la rumeur que sa mère était une »demi-juive ». L’auteur consacre également plusieurs pages à démonter les mensonges rétrospectifs de la réalisatrice concernant ses relations avec le propagandiste et gauleiter nazi Julius Streicher.  C’est une autre anecdote un peu longuement narrée par l’auteur que je voudrais donner un aperçu :

Elle ne souhaite pas revivre les aléas misogynes de Victoire de la foi. C’est pourquoi dès le départ Leni Riefenstahl sort ses griffes. Et lorsque l’opérateur Schünenannm refuse de travailler sous ses ordres, elle écrit aussitôt à la Chambre du cinéma une lettre de dénonciation datée du 17 août 1934:

Monsieur Auen,
Comme vous l’avez peut-être entendu dire, je tourne actuellement, à la demande du Führer, un film sur le Jour du parti de 1934. J’ai besoin de cameramen pour Nuremberg j’ai donc demandé à plusieurs associations de me communiquer noms et adresses. Parmi ces noms figurait celui de Monsieur Schünemann. Ma secrétaire lui a téléphoné et il a répondu qu’il était occupé mais il a demandé de quel film il s’agissait.
Ma secrétaire lui a alors répandu qu’il s’agissait du film sur le Jour du parti. Il a voulu savoir si c’était le film que Leni Riefenstahl était en train de faire. Elle a répandu affirmativement et Monsieur Scbünnemann a déclaré qu’il ne participerait pas à ce film. C’était une question de principe. Cela porterait atteinte à sa dignité.
J’estime que ce genre de réponse est une insulte à la tâche qui m’a été confiée par le Führer. Il est de mon devoir de vous le communiquer en vous suggérant de faire quelque chose.

[…]

Le 21 août, soit quatre jours après la plainte de Leni Riefenstahl, Emil Schünemann est contraint de livrer des explications à la Chambre. Dans une lettre datée du 23, ce dernier affirme que  « la plainte de Mademoiselle Riefenstahl est totalement injustifiée » ; toutefois, il reste très évasif sur la raison pour laquelle il refuse de travailler sur Le Triomphe de la Volonté: « je n’ai rien fait d’autre que de refuser à travailler sous la direction artistique de Mademoiselle Riefenstahl. Ma déclaration ne concerne que ce point précis. » Ces propos ne convainquent pas la Chambre qui, le jour même, lui ordonne de se justifier sur son refus. Le 25 août, Emil Schünemann explique alors que tout cela n’est pas d’ordre politique, mais dicté par sa misogynie : travailler pour une femme serait porter atteinte à sa dignité, explique-t-il. La Chambre cinématographique du Reich accepte cette discrimination et n’inquiétera plus le caméraman.

Après la guerre Schünemann donne une autre version des raisons de son refus de travailler sur le Triomphe de la volonté.

En janvier 1949, Emil Schünemann écrivit de même une lettre au journal Die Welt qui suivait de près la dénazification de Leni Riefenstahl. Il y prétend que ses véritables motivations étaient bel et bien d’ordre politique.

J’ai jadis déclare en effet, qu’il était contraire à ma dignité de faire des films de propagande de cette sorte. Cette remarque m’avait mis en danger. Je donnai alors un tout autre sou à mes paroles sur le conseil de M. Alberti, qui dirigeait la section culturelle et sous les ordres de qui se trouvait Monsieur Auen je déclarai que ma dignité m’interdisait de travailler sous les ordres de Leni Riefenstahl. Cette dernière avait reçu du Führer une maison de Dahlem. Elle admettait aussi que le Führer la reçût sans rendez-vous. A ce moment-là, elle aurait été fort heureuse de me livrer à la Gestapo si M. Alberti ne m’avait pas protégé.

Lilain Auzas ne semble pas très convaincu par cette version des faits qui a pourtant, nous dit-il, été acceptée par « beaucoup d’historiens ». Je vous laisse juger de ses arguments.

« Pourtant, le premier courrier de Leni Riefenstahl démontre bien que c’est lorsque son nom est prononcé que Schünemann refuse catégoriquement. En outre, il est étonnant qu’un membre de la Chambre culturelle du Reich prenne la défense d’un opposant politique, surtout compte-tenu du contexte. Enfin, dans cette lettre d’Après-Guerre, Schünemann anticipe et extrapole des événements postérieurs à 1934: Leni Riefenstahl n’avait pas encore de villa à Dahlem, quartier résidentiel de Berlin ; et Le Triomphe de la volonté n’étant pas encore réalisé, la cinéaste n’était pas l’archange du Troisième Reich comme la postérité a pu la décrire. Enfin, Leni Riefenstahl fréquentait beaucoup de gens avec lesquels elle était en désaccord sur le plan politique sans les dénoncer pour autant, tels Heinz von Jaworsky ou Hans Schneeberger. Elle prendra même la défense de Künneke, un compositeur d’opérettes juif, auprès de Goebbels. Il semble donc plus probable que Schünemann ne voulait pas travailler pour Leni Riefenstahl pour des raisons personnelles comme il l’avait lui-même déjà indiqué en 1934. On oublie souvent qu’Emil Schünemann fut opérateur sur de nombreux films entre 1933 et 1945, et notamment dans deux grosses productions du Troisième Reich : Die Reiter von Deutsch-Ostafrika (Les Cavaliers d’Afrique orientale allemande d’Herbert Selpin, 1934) et Hände hoch! (Haut les mains ! d’Alfred Weidenmann, 1942). »

 

Émancipation féminine

19 jeudi Juil 2018

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féminisme, Karen Blixen

« Il faut bien dire que l’on était alors aux tout premiers jours du mouvement, dit  » d’émancipation de la femme ». Bien des choses étranges eurent lieu en ce temps-là. Je ne crois pas que sur le moment le mouvement pénétra très loin dans les couches sociales; mais voilà que des jeunes femmes de grande intelligence y participaient, que les plus spirituelles et les plus hardies d’entre elles, saisies d’un farouche désir de voler de leurs propres ailes, émergeaient enfin d’un obscurantisme millénaire, pour regarder le soleil en face. Je crois que certaines revêtirent l’armure et prirent le nimbe de Jeanne d’Arc, vierge émancipée, elle aussi, et finirent par rejoindre la cohorte des anges de lumière. Mais la plupart des femmes, dès qu’elles ont le loisir de jouer avec la vie, courent au sabbat des sorcières.

Personnellement, je les respecte pour cela; et je crois ne m’être jamais sérieusement épris d’une femme n’ayant jamais enfourché un balai. »

Karen Blixen, Le vieux chevalier errant, in Contes Gothiques, p. 117

« Mais Dieu sait ce que sont les femmes de cette génération, nées après la Révolution française et les romans de Mme de Staël. La richesse, une situation brillante et un mari indulgent ne leur suffisent pas. Elles veulent faire l’amour  comme nous prenons le Saint-Sacrement »

Karen Blixen, Sur la route de Pise, in Contes Gothiques, p. 221

Privilège de la solitude

07 samedi Juil 2018

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féminisme, Karen Blixen, solitude

« J’ai toujours considéré qu’un grand préjudice a été porté à la femme en ce qu’elle ne s’est jamais trouvée seule dans l’Éden. Adam, lui, a eu le temps, long ou court, peu importe, de se promener, en pleine possession de soi, sur une terre toute neuve et paisible, parmi les animaux ; et la plupart des hommes sont nés avec le souvenir de cette époque. Mais la pauvre Eve, à son arrivée dans le monde, trouva son époux installé avec toutes ses prétentions masculines. C’est pourquoi la femme sent qu’elle a une revendication à faire au Créateur le droit d’avoir pour un temps le Paradis à elle toute seule. »

Karen Blixen, Le vieux chevalier errant, in Contes Gothiques, p. 117

Féminisme médiéval

05 vendredi Août 2016

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Boccace, cocuage, féminisme, fidélité, utilitarisme

Sous ce titre un brin anachronique, je souhaite partager un extrait du Décaméron, plus exactement de la septième nouvelle de la sixième journée. Posons d’abord quelques éléments de contexte  : une noble dame nommée Filippa a été surprise dans les bras de son amant par son mari Rinaldo de Pugliesi.  Celui-ci, plutôt que de laisser immédiatement s’exprimer sa colère contre les amants pris sur le fait, recourt à la justice ce qui expose sa femme à un châtiment particulièrement sévère :

« Une disposition statutaire, aussi sévère que critiquable à vrai dire, était en vigueur à Prato, aux termes de laquelle devait être brûlée vive, sans distinction, aussi bien la femme adultère trouvée par son mari en compagnie de son amant que celle qui se donnait au premier venu pour de l’argent. »

Dame Filippa se présente devant le magistrat (le podestat) qui s’attend à ce qu’elle nie les faits pour sauver sa vie. Elle déclare alors ce qui suit :

«Messire, Rinaldo est bien mon mari, et il est exact qu’il m’a trouvée la nuit précédente dans les bras de Lazzarino qui m’ont souvent serrée, car j’ai pour lui un amour digne et profond, et il n’est pas question que je nie un instant les faits. Mais vous savez, j’en suis certaine, que les lois doivent être les mêmes pour tous et être faites avec l’assentiment de ceux auxquels elles s’appliquent. Or, tel n’est pas le cas, puisque ladite disposition n’a pour cible que les pauvres femmes sans défense qui pourraient bien mieux que les hommes contenter de nombreux désirs. De plus, jamais femme n’a donné son assentiment à une telle disposition, aucune n’a jamais été appelée à donner son avis en la matière : on peut donc à juste titre considérer ce texte comme mauvais. Libre à vous, si vous le désirez, de prendre la responsabilité de son application, au préjudice de mon corps et de votre âme ; mais, avant que vous ne prononciez votre jugement, faites-moi, je vous en prie, la petite faveur de demander à mon mari si, toutes les fois qu’il en a eu le désir, je ne me suis pas offerte à lui généreusement, sans jamais refuser. »

À quoi Rinaldo, sans attendre que le podestat lui pose la question, répondit promptement que sa femme avait assurément répondu à chacune de ses requêtes, contentant pleinement ses désirs.

«Donc, poursuivit aussitôt la dame, si mon mari a toujours eu de moi ce qu’il voulait et ce qui le contentait, dites-moi, messire le podestat, ce que je devais faire et ce que je dois faire de l’ardeur qui me reste. Dois-je la jeter en pâture aux chiens? Ne vaut-il pas mieux en faire profiter un gentilhomme qui m’aime plus encore que soi-même, plutôt que de la laisser dépérir et se flétrir?»

Boccace, Décaméron VI,7, trad. Christian Bec, Livre de poche p. 512 – 514

Rassurez-vous, tout finit bien : Rinaldo se désiste de son procès et Filippa rentre chez elle « tête haute, libre et heureuse », de plus les habitants de Prato, convaincus par les arguments de Filippa, suppriment la loi qui lui avait fait encourir la mort (plus exactement ils restreignent l’application du châtiment suprême aux femmes trompant leur mari pour de l’argent).

*

Boccaccio-Decameron

A Tale from Decameron par John William Waterhouse

L’argumentation de Filippa comprend deux parties. La première critique la loi punissant de mort les femmes adultères prises en flagrant délit ; il est frappant de constater qu’elle invoque des principes de légitimation qui nous sont aujourd’hui familiers : le principe d’égalité devant la loi et le principe du consentement à la loi. La seconde partie de l’argumentation critique moins la loi que la plainte du mari : Filippa fait valoir que son infidélité n’a causé aucun préjudice à son époux puisque ce qu’elle a accordé à son amant, elle n’en a pas privé son mari.  Sa manière de présenter l’obligation de fidélité comme un gaspillage d’une « ardeur » qui pourrait combler les désirs d’un tiers, donne à son argumentation une allure de critique utilitariste d’une conception déontologique de la fidélité [1]. On notera que l’idéal utilitariste d’une consommation optimale des ressources libidinales se trouverait ici réalisé par la voie « libérale » d’une entente « horizontale » entre les individus, et non sous la forme de la planification centralisée et autoritaire que l’on rencontre dans Nous autres de Zamiatine [2].

Rinaldo qui n’est pas à la hauteur de sa femme en matière d’appétence sexuelle ne l’est manifestement pas non plus en matière de capacité argumentative, sans quoi il aurait pu faire valoir que, même si elle n’induit pas une frustration de sa propre libido, l’infidélité de sa femme  l’expose à un préjudice possible : celui de devoir assumer la paternité d’un enfant qui n’est pas le sien.

Bien sûr toutes les nouvelles du Décaméron ne sont pas aussi « féministes » que celle que je viens de citer. Dans certaines nouvelles, les femmes sont plutôt en position d’objets que de sujets de désir : trésors que les hommes se disputent ou qu’ils se donnent les uns aux autres. Il faut aussi mentionner une nouvelle (Décaméron VIII, 9) qui encourage les hommes à battre leur femme. Cependant on constate que les nouvelles qui évoquent le thème de l’infidélité conjugale des femmes, comme d’ailleurs celles qui évoquent les manquements des religieuses à leur vœu de chasteté, présentent la satisfaction de la libido féminine comme foncièrement légitime et les obstacles à cette satisfaction comme arbitraires (chez Boccace, il semble que le cocu mérite de l’être).

*

[1] C’est-à-dire une conception selon laquelle on doit être fidèle – parce qu’on l’a promis lors du mariage, par exemple – quelles qu’en soient les conséquences.

[2] Une autre nouvelle (VIII,8) se conclut par une sorte de transition d’un libéralisme sexuel à un communisme sexuel. D’abord Monsieur A couche avec Madame B la femme de son meilleur ami, Monsieur B prend sa revanche en couchant avec Madame A. Finalement après que chacun a été trompeur et trompé (en étant conscient de l’être) la propriété privée des « moyens de reproduction » se trouve abolie : « A partir de ce jour là, chacune des femmes eut deux maris et chacun d’eux deux épouses, sans jamais avoir à ce sujet la moindre discussion ou querelle » (p.670).

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