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Pater Taciturnus

~ "Ton péché originel c'est d'ouvrir la bouche. Tant que tu écoutes tu restes sans tache"

Pater Taciturnus

Archives Mensuelles: juin 2014

Eloge de l’imperfection

30 lundi Juin 2014

Posted by patertaciturnus in Aphorisme du jour

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perfection et imperfection, Urabe Kenkô

« Quelque soit l’objet, sa perfection est un défaut. Laissez les choses inachevées, comme elles sont, sans fignoler, j’y trouverai de l’intérêt et je me sentirai à l’aise. On me l’a dit : Quand on construit une demeure impériale, il est coutume de laisser un endroit inachevé. Dans les textes religieux, bouddhiques ou autres, écrits par les sages de jadis, n’est-il pas vrai qu’on trouve des exemples de chapitres qui manquent? »

Urabe Kenkô, Les heures oisives, LXXXII

Bonne fête Raymond

29 dimanche Juin 2014

Posted by patertaciturnus in Divers vers

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amour, anniversaire, L'Ami et l'Aimé, pleurer, Raymond Lulle, savoir aimer

L’Eglise catholique a fait de Raymond Lulle un bienheureux. Il est fêté le 29 juin. C’est le moment ou jamais de citer un nouvel extrait du Livre de l’Ami et de l’Aimé.

llull

*

93. – Digues, foll : ¿ has vergonya de les gents con te veen plorar de ton amat ? – Respòs que vergonya sens peccat és per defalliment d’amor qui no sab amar.

93. – « Dis, fol, as-tu honte d’être vu par les gens quand tu pleures pour ton Aimé? » L’Ami répondit : « Honte sans péché vient par manque d’amour chez celui qui ne sait pas aimer. »

La communion sous les deux espèces revisitée

28 samedi Juin 2014

Posted by patertaciturnus in Insatiable quête de savoir

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Bart Ehrman, christianismes disparus, orgies, phibionites, Steven Benko

Comme les carpocrates dont il fut question précédemment, les phibionites sont un courant des premiers temps du christianisme qui fut accusé de se livrer à la débauche au nom d’une  interprétation dévoyée des textes sacrés.  Le problème, comme pour beaucoup de ces courants disparus, c’est qu’ils ne sont connus que par les témoignages de leurs adversaires dont l’objectivité est évidemment sujette à caution. La doctrine et les étranges rituels des phibionites nous sont connus grâce à Epiphane un évêque et théologien orthodoxe qui leur consacre le chapitre 26 de son Panarion (terme qui désigne un coffre à remèdes … entendons ici des remèdes contre les hérésies) dont le texte grec et une traduction anglaise sont disponibles en ligne.  Épiphane prétend d’ailleurs avoir été en contact en Égypte avec des membres de la secte : deux jeunes femmes qui auraient tenté de le séduire pour le convertir. Pour ce que j’ai compris, il n’aurait pas pour autant participé aux cérémonies dont voici le récit condensé par Bart Ehrman :

« Epiphane affirme que les phibionites se livrent à des fêtes somptueuses qui débutent par un salut très spécial : les hommes serrent la main des femmes, en leur caressant et en leur chatouillant secrètement la paume par en dessous (Panarion, 26, 4, 2). Sa description de ce rituel d’admission peut être délibérément ambiguë : il a été interprété à la fois comme un geste érotique, et comme un code destiné à alerter les membres de la présence d’un intrus. Mais les festivités ne commencent réellement que lorsque la compagnie est assise avec nourriture et boisson. Les couples mariés se séparent pour s’engager dans une liturgie de rapports sexuels, chacun avec un autre membre de la communauté (Panarion 26, 4, 4). L’union n’est pas destinée à aboutir cependant, car l’homme se retire avant l’orgasme. Le couple alors recueille la semence dans ses mains et l’avale ensemble en s’écriant : « Ceci est le corps du Christ » . Lorsque c’est possible le couple collecte aussi, et consomme, le sang menstruel de la femme, en disant, « ceci est le sang du Christ » (Panarion 26, 4, 5-8).  Si par hasard la femme tombe enceinte, on laisse le fœtus se développer jusqu’à ce que l’on puisse pratiquer un avortement manuel. Ensuite, affirme Epiphane, il est démembré, enrobé de miel et d’épices, et dévoré par la communauté comme un repas eucharistique spécial (Panarion, 26, 5, 4-6).

Les dirigeants du groupe qui sont parvenus à la perfection n’ont plus besoin de femmes pour ces réjouissances. Ils se livrent à des relations homosexuelles entre eux (Panarion 26, 11, 8). Par ailleurs, nous informe Epiphane, les adeptes pratiquent la masturbation sacrée. Ils peuvent alors consommer le corps du Christ dans l’intimité de leur propre chambre. »

      Bart Ehrman, Les christianismes disparus, p. 310

*

La question de la crédibilité de ce récit semble diviser les spécialistes.  Bart Ehrman incline semble-t-il à penser que le récit d’Epiphane calomnie les phibionites pour les discréditer. Il ne conteste pas qu’Épiphane ait pu être en contact avec des membres de la secte mais il juge peu vraisemblable qu’il ait été informé de tels rituels alors qu’il n’était qu’un converti potentiel. Par ailleurs Ehrman fait valoir que la propension des auteurs orthodoxes à accuser à tort les sectes gnostiques d’immoralité est avérée dans le cas d’autres groupes que les phibionites : les textes retrouvés à Nag Hammadi attesteraient que des groupes accusés de perversion sexuelle prônaient en réalité l’ascétisme.

Ce qui semble le plus vraisemblable aux yeux d’Ehrman, c’est qu’Épiphane ait construit sa description des cérémonies phibionites pour qu’elle coïncide avec ce qu’il savait de leurs croyances théologiques, dont voici un bref aperçu :

« The phibionites believed that the purpose  of the work of the Christ was the restoration of the primordial unity of the universe. The creation of the world and the creation of man had divided and reduced the creator’s power, since everything in existence possesseed a spark of his power. Salvation, therefore, consisted of collecting his power, and leading it back to its original condition. the Gnostics identified divine power with the creative, or generating , substances of the male and female bodies, and they concluded that thier most sacred obligation was to physically collect these substances. […] For this reason they did not want to have any children, because procreating would only further divide the divine power. This was the reasoning behind the gruesome custom of interrupting accidental pregnancy and eating the unborn child. Rather than being a means of achieving sexual stimulation, it was a holy task for the phibionites, by wich the further scattering of the creator’s power was prevented. When they did this they were « co-workers with God » in the plan of salvation »

Stephen Benko, Pagan Rome and the Early Christians, p 68 – 69

Manifestement Steven Benko, à la différence d’Ehrman, accorde crédit au témoignage d’Epiphane et prend au sérieux les pratiques attribuées aux phibionites en tant que rituels religieux.

Un point qui mérite attention pour se faire une idée à ce sujet, ce sont les textes auxquels se référaient les phibionites – aux dires d’Épiphane – pour justifier leurs doctrines et leurs pratiques. Épiphane mentionne un certain nombre de textes sacrés de la secte phibionite : Le livre de Noria (Noria est censée avoir été la femme de Noé), l’Évangile d’Eve, le Livre de Seth, les Questions de Marie. Certains de ces  textes auraient servi à justifier les pratiques précédemment mentionnées :

[They] are not ashamed to say that our Savior and Lord himself, Jesus Christ, revealed this obscenity. For in the so-called “Greater Questions of Mary”—there are also “Lesser” ones forged by them—they claim that he reveals it to her after taking her aside on the mountain, praying, producing a woman from his side, beginning to have sex with her, and then partaking of his emission, if you please, to show that “Thus we must do, that we may live.” And when Mary was alarmed and fell to the ground, he raised her up and said to her, “O thou of little faith, wherefore didst thou doubt?”

Panarion, 26, 8, 1

Mais les phibionites semblent aussi s’être appuyés sur des interprétations – disons originales – de textes considérés comme canoniques par les orthodoxes. C’est évidemment le cas du verset fondant l’eucharistie dont on devine l’interprétation au vue de ce qui précède. : Jean 6,  53 : « Jésus leur dit: En vérité, en vérité, je vous le dis, si vous ne mangez la chair du Fils de l’homme, et si vous ne buvez son sang, vous n’avez point la vie en vous-mêmes. » (cf. Panarion, 26, 8, 4)

De même la masturbation et la consommation du sperme auraient été justifiées par un verset de l’Épître aux Éphésiens (cf. Panarion 26, 11, )

« qu’il travaille, en faisant de ses mains ce qui est bien, pour avoir de quoi donner à celui qui est dans le besoin. »

Épître aux Ephésiens, 4, 28

Certains textes de l’Ancien Testament auraient également fait l’objet d’interprétation surprenantes :

And when David says, “He shall be like a tree planted by the outgoings of water that will bring forth its fruit in due season,” they say he is speaking of the man’s dirt. “By the outgoing of water,” and, “that will bring forth his fruit,” means the emission at climax. And “Its leaf shall not fall off” means, “We do not allow it to fall to the ground, but eat it ourselves.”

Panarion 8, 7

And so as not to do more harm than good by making their prooftexts public, I am going to omit most of them—otherwise I would cite all their wicked sayings and go through them here.  When it says that Rahab put a scarlet thread in her window, this was not scarlet thread, they tell us, but the female organs. And the scarlet thread means the menstrual blood, and “Drink water from your cisterns” refers to the same.

Panarion, 26, 9, 1

Le premier texte fait référence aux Psaumes (1, 3), l’histoire de Rahab fait partie du livre de Josué (chapitre 2) et « bois les eaux de ta citerne » est tiré des Proverbes (5, 15)

Pour les amateurs de détail, je recommande un article de 1967 de Stephen Benko dans lequel il précise sur quelles altérations du texte et sur quels jeux entre sens propre et figuré reposent ces interprétations. Il signale au passage que les procédés employés par les phibionites dans l’interprétation du passage concernant Rahab ne sont pas très différents de ceux qu’employaient les orthodoxes lorsqu’ils s’efforçaient de trouver une annonce de la croix dans de multiples passages de l’Ancien Testament.

*

Comme je l’ai signalé, Bart Ehrman, à la différence d’autres auteurs qui ont écrit sur le sujet, se montre sceptique envers le témoignage d’Épiphane à propos des cérémonies phibionites. Je me garderai bien de trancher entre les interprétations en présence. Il est vrai que le récit d’Épiphane est tellement énorme qu’il est tentant de croire à de la calomnie. D’un autre côté, je trouve quand même la position d’Ehrman inconfortable car il met en doute le témoignage d’Épiphane sur les pratiques des phibionites tout lui en concédant une connaissance de leur théologie et de leurs textes sacrés.

« Est-il possible qu’Epiphane ait découvert des descriptions de rituels phibionites dans les livres sacrés du groupe? Il connaît visiblement bien leur littérature. Dans son commentaire, il parle de plusieurs de leurs livres et cite certains de leurs enseignments. Mais il n’affirme jamais avoir trouvé dans ces écrits les pratiques orgiaques et cannibales du groupe. Ces livres ne peuvent guère avoir été des manuels pratiques »  

Les christianismes disparus, p. 313

Si la description des rituels est une construite à partir d’une connaissance effective des textes et de la théologie phibionite peut-elle être si calomnieuse que cela? Ehrman ne suggère pas du tout qu’Épiphane a inventé ces interprétations des textes bibliques qui sentent le stupre (d’ailleurs, s’il les avait inventé, c’est lui qui aurait eu l’esprit singulièrement mal tourné). Mais s’il n’a pas inventé les textes et les interprétations qui recommandent la consommation du sperme ou du sang menstruel pourquoi aurait-il « inventé » ces pratiques?

This is dedicated to the one I love (2)

27 vendredi Juin 2014

Posted by patertaciturnus in Fantaisie

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diamant, Joseph Joubert

« Des vrais et des faux diamants. Mêmes facettes, même éclat. Mais il y a, dans la lumière des premiers, une liberté, une joie qui ne se trouve pas dans la lumière des secondes. Le vrai y manque : « Rien n’est beau que ce qui est vrai. » (Boileau.) »

Joseph Joubert, 1er mars 1815, Carnets II, p. 492

*

Pour des explications un peu plus rigoureuses.

Bienvenue à nos aimables visiteurs (9)

27 vendredi Juin 2014

Posted by patertaciturnus in Bienvenue aux visiteurs, Insatiable quête de savoir, Paroles et musiques

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bienvenue, zampogna

L’autre pays de la cornemuse …

*

*

Pour des explications à propos des différences avec la cornemuse écossaise

Par saint Barnabé, sus aux belettes !

26 jeudi Juin 2014

Posted by patertaciturnus in Fantaisie

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Monty Python

Barnabé et les belettes

26 jeudi Juin 2014

Posted by patertaciturnus in Fantaisie, Insatiable quête de savoir

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Bart Ehrman, Epitre de Barnabé

Bart Ehrman consacre quelques pages de ses Christianismes disparus à l’Epître de Barnabé, un texte qui ne fut pas intégré au Nouveau Testament bien qu’il ait été attribué (vraisemblablement à tort) à l’apôtre Barnabé. Ce texte appartient au courant des premiers temps du christianisme qu’Ehrman qualifie de proto-orthodoxe. Ehrman le cite pour illustrer la problématique de la captation d’héritage à laquelle les chrétiens proto-orthodoxes cherchent à se livrer envers les juifs : comment se réclamer des Ecritures du judaïsme sans rester dans le giron du judaïsme (à la différence du courant chrétien Ebionite), comment déposséder les juifs de leurs écritures saintes ?

« Barnabé est particulièrement résolu à montrer que les juifs ont tort de prendre au sens littéral les lois alimentaires de l’Ancien Testament. Dieu ne voulait pas dire que son peuple ne devait pas manger du porc, du lapin ou de la hyène, toutes nourritures interdites par la Torah. L’injonction de ne pas manger de porc signifie, en réalité, de ne pas vivre comme des pourceaux qui grognent bruyamment lorsqu’ils ont faim mais gardent le silence quand ils sont rassasiés. Les gens ne doivent pas traiter Dieu de cette manière, venant à lui avec de grandes requêtes quand ils sont dans le besoin, et l’ignorant lorsqu’il ne le sont plus (10, 3). Ne pas manger de lapin signifie ne pas vivre comme ces animaux dont l’appétit sexuel croît sans cesse et – ce que nous précise Barnabé dans un très étrange passage – qui chaque année se voient pourvus d’un nouvel orifice, leur permettant de se propager au hasard et de commettre, l’inceste (10,6).  De même ne pas manger de la hyène signifie ne pas vivre licencieusement, comme cet animal aux mœurs dissolues qui change de sexe chaque année, devenant tour à tour mâle et femelle (10, 7). Plus particulière encore est l’interdiction de manger de la belette. Barnabé indique (sans doute sur la foi, comme en d’autres exemples, de preuves avancées par le bestiaire antique) que la belette conçoit par la bouche ; il émet ce commandement donc, pour interdire le sexe oral. Ne faites pas, dit-il, « comme ceux qui sont réputés accomplir  une action immorale dans leur bouche parce qu’ils sont impurs, et n’enlacez pas des femmes qui accomplissent l’action immorale dans leur bouche » (10, 9) »    

Bart Ehrman, Les christianismes disparus, p. 232

En note Ehrman apporte une précision amusante : le commandement de ne pas manger de belette n’existe pas dans les Ecritures, et il commente : « ce qui provoque le soupçon qu’il y a plus qu’un peu de voyeurisme chez Barnabé.

Pour les amateurs, des traductions anglaises de l’Épître de Barnabé sont disponibles en ligne.

Jésus, farceur ou pigeon ?

25 mercredi Juin 2014

Posted by patertaciturnus in Insatiable quête de savoir

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Bart Ehrman, blague

Je reprend ma série d’articles inspirée par la lecture des Christianismes disparus de Bart Ehrman. La semaine dernière j’ai rapporté la version déconcertante de la crucifixion proposée par Basilide : Jésus aurait échappé à la crucifixion en échangeant son apparence avec celle de Simon de Cyrène que les romains avaient réquisitionné pour l’aider à porter la croix. Ainsi c’est Simon qui aurait été crucifié à la place de Jésus. Bien sûr, si on suppose Jésus doté des pouvoirs de changement d’apparence que lui prête Basilide, on est tenté de se demander pourquoi il ne les utilise pas pour échapper à la mort sans laisser un innocent être être sacrifié à sa place. Il faut croire que le Christ a trouvé l’histoire plus amusante comme cela ; c’est du moins ce que suggère Basilide qui imagine Jésus riant du bon tour ainsi joué à ses ennemis.

On peut donner à cette hypothèse de la mauvaise plaisanterie divine une forme encore plus ramassée, dans laquelle le pigeon n’est pas Simon de Cyrène mais Jésus lui même. Une telle version, comme celle de Basilide est bien sûr parfaitement hérétique. Elle suppose une forme particulière d’hérésie : le séparationisme. Face à la position qui s’est imposée comme l’orthodoxie : la thèse de Jésus vraiment Dieu et vraiment homme, il existait diverses thèses hérétiques : pour le docétisme Jésus était vraiment Dieu et n’avait qu’une apparence humaine ; pour les thèses adoptationistes Jésus était seulement un humain fils de Joseph et Marie mais il avait été adopté par Dieu ; la version séparationiste consistait à supposer que l’humain Jésus avait été « habité » par une entité divine qui serait entré en lui lors de son baptême mais qui l’aurait quitté lors de la crucifixion.

 » Irénée nous dit que l’Évangile de Marc était celui choisi par ceux qui « séparent Jésus du Christ » (Contre les hérétiques 3, 11, 7) Cela ne paraitra pas surprenant à ceux qui connaissent bien l’Évangile de Marc où il est dit que lors de scène du baptême, l’Esprit saint est entré « dans » Jésus (en grec; Marc 1, 10) ; et à la fin de sa vie, sur la croix, Jésus s’écrie « Mon Dieu, mon Dieu, pourquoi m’as-tu abandonné? » – ou plus littéralement : « Pourquoi m’as tu laissé en arrière? » (Marc 15, 34). Nous savons que certains gnostiques interprétaient le verset comme indiquant que le Christ avait abandonné Jésus pour qu’il affronte la mort seul. L’Évangile gnostique de Philippe, par exemple, interprète les paroles de Jésus de cette manière: « C’est sur la croix qu’il prononça ces mots, car c’est là qu’il fut séparé » (v.68). Reconnaître l’interprétation du verset peut aider à expliquer pourquoi il fut modifié dans certains manuscrits, où au lieu de s’écrier : « Pourquoi m’as tu abandonné? » Jésus s’écrie : « Mon Dieu, mon Dieu, pourquoi t’es- tu moqué de moi? »

Il s’agit d’une modification fascinante, en partie parce qu’elle correspond si bien à ce qui est arrivé dans un autre passage de Marc où tout le monde se moque de Jésus : les soldats, les deux criminels devant être crucifiés avec lui, les passants. Et ici à la fin, même Dieu se moque de lui. Cependant ce n’était pas ce que le texte original disait. Presque tous nos manuscrits préservent le texte qui nous est familier, à savoir la traduction correcte des mots araméens qui ont été cités dans le verset précédent :  » Eloï, Eloï, lama sabachtani? ». »

Bart Ehrman, Les christianismes disparus, p. 344- 345

Comme le séparationisme distingue Jésus (homme) et le Christ (Dieu qui habite temporairement Jésus) : il autorise une version dans laquelle c’est le Christ qui se moque de Jésus.

Je présume que ce dédoublement de Jésus et du Christ permet de faire l’économie du « détriplement » de Dieu en Père, Fils et Esprit qu’opère la conception orthodoxe. Ainsi le « Pourquoi m’as tu abandonné » qui, pour un séparationniste, est adressé par Jésus au Christ, est adressé, pour un orthodoxe, par le Fils au Père.  Bien sûr il n’est guère envisageable d’un point de vue orthodoxe de dire que le Père se moque du Fils ou qu’il lui a fait une bonne blague en l’envoyant se faire crucifier.  Ceci dit, si le Fils peut se croire abandonné du Père, pourquoi ne pourrait-il pas croire que le Père se moque de lui?

 

Misogynie du soleil levant

24 mardi Juin 2014

Posted by patertaciturnus in Fantaisie

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misogynie, Urabe Kenkô

« On dit que tout homme doit être élevé de façon à ne point se faire moquer des femmes. […]

Pour intimider à ce point les hommes, quel être merveilleux que la femme, croirait-on, alors que par nature, elle est toute perversion. Profondément attaché à soi et d’une extrême convoitise, ignorant la raison des choses et l’esprit prompt à se porter toujours à l’égarement, artificieuse en paroles et refusant de répondre à la question la plus anodine : serait-ce prudence? mais la voici qui, sans qu’on lui demande, débite les pires indiscrétions! La profondeur de ses ruses, ses faux apprêts, penserait-on, doivent passer la sagesse des hommes, mais elle ignore que la vérité se dévoile tout aussitôt. Point droite, pourtant point adroite – telle est la femme. Vouloir suivre son cœur et s’en faire bien voir, quelle misère! Pourquoi donc se laisser intimider par elles? S’il était une femme intellectuelle, elle serait également distante et ennuyeuse. C’est seulement quand on lui obéit, esclave égaré, qu’une femme peut paraître douce et digne d’intérêt. »

Urabe Kenkô, Les heures oisives, CVII

Empoisonneur

23 lundi Juin 2014

Posted by patertaciturnus in Pessoa est grand

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Fernando Pessoa, intranquillité

PESSOA4

« Ah, mais comme je voudrais jeter au moins dans une âme un peu de poison, d’intranquillité et de désarroi. Cela me consolerait quelque peu de la nullité de l’action dans laquelle je vis. Pervertir deviendrait le but de ma vie. Mais y a-t-il une seule âme que mes paroles fasse vibrer? un seul être qui sache les entendre, en dehors de moi? »

F. Pessoa, Le livre de l’intranquillité, §. 65

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