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Pater Taciturnus

~ "Ton péché originel c'est d'ouvrir la bouche. Tant que tu écoutes tu restes sans tache"

Pater Taciturnus

Archives de Tag: maîtrise et servitude

ça ne tient pas debout ton histoire! (2)

01 mercredi Mai 2019

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Jean-Paul Sartre, maîtrise et servitude

On pourrait s’étonner que Sartre propose dans Matérialisme et révolution une resucée de la dialectique hégélienne du maître et de l’esclave dont il a fait une intéressante critique dans un passage des cahiers pour une morale.

« En fait l’élément libérateur de l’opprimé, c’est le travail. En ce sens c’est le travail qui est d’abord révolutionnaire. Certes il est com­mandé et prend d’abord figure d’asservissement du travailleur: il n’est pas vraisemblable que celui-ci, si on le lui eût imposé, eût choisi de faire ce travail dans ces conditions et dans ce laps de temps pour ce salaire. Plus rigoureux que le maître antique, le patron va jusqu’à déterminer à l’avance les gestes et les conduites du tra­vailleur. Il décompose l’acte de l’ouvrier en éléments, lui en ôte cer­tains pour les faire exécuter par d’autres ouvriers, réduit l’activité consciente et synthétique du travailleur à n’être plus qu’une somme de gestes indéfiniment répétés. Ainsi tend-il à ravaler le travailleur à l’état de pure et simple chose en assimilant ses conduites à des pro­priétés. […] L’ouvrier devient l’homme d’une seule opération qu’il répète cent fois par jour; il n’est plus qu’un objet et il serait enfantin ou odieux de raconter à une piqueuse de bottines ou à l’ouvrière qui pose les aiguilles sur le cadran de vitesse des automobiles Ford qu’elles conservent, au sein de l’action où elles sont engagées, la liberté intérieure de penser. Mais dans le même temps, le travail offre une amorce de libération concrète, même dans ces cas extrêmes, parce qu’il est d’abord néga­tion de l’ordre contingent et capricieux qui est l’ordre du maître. Au travail, l’opprimé n’a plus le souci de plaire au maître, il échappe au monde de la danse, de la politesse, de la cérémonie, de la psycholo­gie; il n’a pas à deviner ce qui se passe derrière les yeux du chef, il n’est plus à la merci d’une humeur: son travail, certes, lui est imposé à l’origine et on lui en vole finalement le produit. Mais entre ces deux limites, il lui confère la maîtrise sur les choses ; le travailleur se saisit comme possibilité de faire varier à l’infini la forme d’un objet matériel en agissant sur lui selon certaines règles universelles. En d’autres termes, c’est le déterminisme de la matière qui lui offre la première image de sa liberté.

Jean-Paul SARTRE, Matérialisme et révolution

 

La peur des maîtres

30 samedi Mar 2019

Posted by patertaciturnus in Lectures

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Alfred Métraux, crainte, maîtrise et servitude, négrophobie

Un détour méconnu de la dialectique du maître et de l’esclave.

« On n’est jamais cruel et injuste avec impunité ; l’anxiété qui se développe chez ceux qui abusent de la force prend souvent la forme de terreurs imaginaires et d’obsessions démentielles. Le maître méprisait son esclave mais redoutait sa haine. Il le traitait en bête de somme, mais se méfiait des pouvoirs occultes qu’il lui attribuait. La crainte que les Noirs inspiraient augmentait donc avec leur avilissement. La peur diffuse que l’on perçoit  dans les témoignages de l’époque s’est concrétisé dans la hantise du poison qui, tout au long du XVIIIe siècle a été cause de tant d’atrocités. »

Alfred Métraux, Le vaudou haïtien, Tel, p. 11

ça tient pas debout ton histoire !

01 lundi Mai 2017

Posted by patertaciturnus in Lectures

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dialectique, Hegel, Jean-Paul Sartre, maîtrise et servitude, travail

Quelle meilleure façon de célébrer le 1er mai que de conspuer la dialectique hegelienne du maître et de l’esclave ?

« La théorie hégélienne du maitre et de l’esclave est séduisante comme phénoménologie des rapports humains mais ne tient pas debout historiquement : 1° L’esclave n’a rien inventé techniquement pendant l’Antiquité. Il était d’ailleurs essentiellement domestique ou travailleur agricole. Travaillant en équipe, il avait moins  l’occasion de saisir l’efficacité de son travail sur l’objet, comme l’ouvrier moderne « à la chaîne ». 2° Le stoïcisme pas plus que  le scepticisme n’ont été inventés par des esclaves mais par des hommes libres. A Rome le stoïcisme est devenu une théorie de maître (pour un Epictète, un grand courtisan comme Sénèque, un empereur comme Marc Aurèle). Plutôt qu’une théorie d’esclave qui  prend le point de vue du maître, j’y vois plutôt une théorie du maître  qui se prémunit contre le danger de devenir esclave et qui réfugie son orgueil de maître dans le seul bien qui n’est pas menacé : la pensée. Car il faut avoir des biens et s’en détacher pour être stoïcien — non point se consoler de ne pas en avoir. 3° La théorie de l’esclave qui ne risque pas sa vie et qui apprend dans la peur et le travail sa liberté est vraie pour une première génération d’esclaves, non pour la seconde ou la troisième : l’esclave, né à la maison, traité en familier, n’a plus si peur — peut-être plus peur du tout -, se sent justifié (inessentiel par rapport à un maitre essentiel donc est complice du maitre (vieux esclaves demeurant en Géorgie près de leurs anciens maîtres) et se trouve en situation naturelle. 4° Il n’est pas vrai que le maître n’a pas d’histoire. Car il y a d’autres maîtres avec qui il est en commerce (famille, Etat, guerre). Et c’est lui qui conquiert l’Empire romain (les soldats sont des hommes libres). C’est par lui, non par les esclaves, que le christianisme entre à Rome. 5° Les inventions techniques et découvertes scientifiques ne sont pas l’affaire des esclaves et serfs. Ce sont des clercs ou des hommes libres de classe moyenne qui la plupart du temps les réalisent. Il ne reste rien de la théorie de Hegel qu’un rapport idéal et idéalement vrai. »

Jean-Paul Sartre, Cahier pour une morale, p. 79 – 80

Topoï laborieux

16 dimanche Avr 2017

Posted by patertaciturnus in Fantaisie, Mon métier ma passion

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dialectique, maîtrise et servitude, problèmes de digestion

La lecture répétitive de références aux Temps modernes est aliénante. Lorsque je serai dictateur du monde cette référence sera interdite dans les dissertations de philosophie.

Corriger les copies d’élèves que je n’ai pas en cours lors du bac ou d’examens blancs me conforte régulièrement dans ma décision de ne pas faire de place dans mes cours à ce monument prétendument incontournable qu’est la dialectique du maître et de l’esclave. La qualité des cours des collègues sur le sujet a beau être hors de doute, ce qu’il en reste dans les copies frise presque toujours le ridicule : si les élèves étaient convaincus de ce qu’ils écrivent, ils devraient en effet sur le champ aller se vendre comme esclave pour être plus libres que leurs maîtres. On dira que leurs estomacs ne sont pas encore assez robustes pour digérer ce morceau de choix qu’est la dialectique hégélienne, pour ma part je ne suis pas loin de penser que le ridicule des abrégés de la dialectique du maître et de l’esclave dans les copies est révélateur d’une faiblesse du monument original.

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