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Pater Taciturnus

~ "Ton péché originel c'est d'ouvrir la bouche. Tant que tu écoutes tu restes sans tache"

Pater Taciturnus

Archives de Tag: conscience

Solitude

03 jeudi Fév 2022

Posted by patertaciturnus in Divers vers

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conscience, Idea Vilariño, solitude

Lost in Marienbad: Tallar la herida. Poemas de Idea Vilariño

La soledad

Esta limitación esta barrera
esta separación
esta soledad esta soledad la conciencia
la efímera gratuita cerrada
ensimismada conciencia
esta conciencia
existiendo nombrándose
fulgurando un instante
en la nada absoluta
en la noche absoluta
en el vacío.
Esta soledad
esta vanidad la conciencia
condenada
impotente
que termina en sí misma
que se acaba
enclaustrada en su luz
y que no obstante se alza
se envanece
se ciega
tapa al vacío con cortinas de humo
manotea ilusiones
y nunca toca nada
nunca conoce nada
nunca posee nada.
Esta ausencia distancia
este confinamiento
esta desesperada
esta vana infinita soledad
la conciencia.

Idea Vilariño, Última Antología

La solitude

Ce contrôle cette barrière
cette séparation
cette solitude cette solitude la conscience
conscience éphémère gratuite close
en soi-même enfermée
cette conscience
qui se perpétue qui se nomme
fulguration d’un instant
dans le rien absolu
dans la nuit absolue
dans le vide.
Cette solitude
cette vanité la conscience
damnée
impuissante
qui finit en elle-même
qui expire
prisonnière de sa lumière
et qui pourtant se lève
se vante
s’aveugle
masque le vide de rideaux de fumée
brasse les illusions
et jamais n’effleure rien
jamais ne connaît rien
jamais ne tient rien.
Cette absence distance
cette prison
cette désespérée
cette solitude vaine infinie
la conscience.

trad. Eric Sarner

Rêve de puissance

16 samedi Oct 2021

Posted by patertaciturnus in Lectures

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argent, conscience, Dostoievski, puissance

« La puissance! Je suis persuadé que beaucoup riraient énormément s’ils apprenaient qu’une pareille « nullité » vise à la puissance. Mais je les étonnerai encore davan­tage : dès mes premières rêveries peut-être, c’est-à-dire depuis mon enfance ou presque, je n’ai jamais pu me voir autrement qu’au premier rang, partout et en toutes cir­constances. J’ajouterai un aveu singulier : peut-être que cela dure encore. Et je noterai en outre que je ne demande pas pardon.

C’est justement là mon « idée », c’est là sa force, que l’argent est la seule voie capable de conduire au premier rang une nullité. Je ne suis peut-être pas une nullité, mais je sais par exemple, par les miroirs, que mon extérieur me nuit, parce que j’ai le visage ordinaire. Mais si j’étais riche comme Rothschild, qui donc s’inquiéterait de mon visage? Je n’aurais qu’à siffler, et des milliers de femmes courraient à moi avec leurs « beautés ». Je suis même convaincu que, très sincèrement, elles finiraient par me croire beau. Je suis peut-être même intelligent. Mais si j’avais même un front de sept pouces, il s’en trouverait vite un de huit, et je serais perdu. Tandis que, si j’étais Rothschild, est-ce que ce sage de huit pouces aurait la moindre valeur à côté de moi? On ne le laisserait même pas ouvrir la bouche! Je suis peut-être spirituel; oui, mais à côté de moi il y a Talleyrand, Piron, et me voilà éclipsé : tandis que, si j’étais Rothschild, où seraient les Piron et peut-être même les Talleyrand? L’argent, sans doute, et une puissance despotique, mais c’est en même temps la suprême égalité, et là et sa grande force. L’ar­gent nivelle toutes les inégalités. Voilà ce que j’avais décidé, déjà à Moscou.

Vous ne verrez bien sûr dans cette pensée qu’in­solence, violence, triomphe de la nullité sur le talent. D’accord, cette pensée et audacieuse (et par suite volup­tueuse). Soit! Mais vous croyez que je voulais alors la puissance forcément pour opprimer? Pour me venger? C’est ainsi qu’agirait fatalement la médiocrité. Bien mieux, je suis convaincu qu’il y a des milliers de ces talents et de ces intelligences si fiers d’eux-mêmes, qui, si on les chargeait tout à coup de tous les millions de Rothschild, n’y tiendraient pas et se conduiraient en viles médiocrités et seraient les pires des oppresseurs. Mon idée est autre. L’argent ne me fait pas peur; il ne m’op­primera pas et ne me fera pas opprimer les autres.

Je n’ai pas besoin de l’argent, ou plutôt ce n’est pas de l’argent que j’ai besoin ; ce n’est pas même de la puissance ; j’ai besoin seulement de ce qui s’acquiert par la puissance et ne se peut acquérir sans elle : la conscience, calme et solitaire, de sa force! Voilà la plus parfaite défi­nition de la liberté, sur laquelle se bat tant le monde! La liberté! J’ai enfin tracé ce grand mot… Oui, la conscience solitaire de sa force est chose belle et enivrante. J’ai la force, et je suis calme. Les foudres sont entre les mains de Jupiter, et il et calme; l’entendez-vous souvent toni­truer? L’imbécile peut croire qu’il sommeille. Mettez maintenant à la place de Jupiter un vulgaire littérateur ou une bonne femme de la campagne, et vous en enten­drez, du tonnerre!

Si seulement j’avais la puissance, raisonnais-je, je n’en aurais plus besoin; je suis sûr que, de moi-même‘ de mon plein gré, j’occuperais partout la dernière place. Si j’étais Rothschild, je me promènerais en pardessus râpé et un parapluie à la main. Qu’est-ce que cela me ferait, d’être bousculé dans la rue ou obligé de courir dans la boue pour ne pas être écrasé par les fiacres? La conscience que c’est moi qui suis Rothschild suffirait à faire ma joie dans ce moment. Je sais que je puis avoir un festin comme personne n’en a, et le premier cuisinier du monde : il me suffit de le savoir. Je mangerai une tranche de pain et de jambon et je serai rassasié de ma conscience. Encore aujourd’hui, c’est ainsi que je pense. »

Dostoïevski, L’adolescent, trad. Pierre Pascal, Folio, p.94 -95

Nihilisme

23 mercredi Juil 2014

Posted by patertaciturnus in Aphorisme du jour, Perplexités et ratiocinations, Pessoa est grand

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conscience, Fernando Pessoa, nihilisme

« La seule attitude digne d’un homme supérieur, c’est de persister tenacement dans une activité qu’il sait inutile, respecter une discipline qu’il sait stérile, et s’en tenir à des normes de pensée, philosophique et métaphysique , dont l’importance lui apparaît totalement nulle. »

Fernando Pessoa, Le livre de l’intranquillité, §89, p. 118

*

Objection facile : S’il s’en tient  « à des normes de pensée, philosophique et métaphysique dont l’importance lui paraît nulle », n’est ce pas parce qu’il y a – au moins à ses yeux –  une norme de pensée qui échappe à la nullité : celle qui définit « la seule attitude digne d’un homme supérieur »?

Questions complémentaires : Quelle est la source de cette norme de second ordre? Qu’est-ce qui lui permet d’échapper à la nullité (à supposer qu’elle le fasse)? Pourquoi cette norme est-elle telle et non autre ?

Journal lucide 3

01 samedi Mar 2014

Posted by patertaciturnus in Perplexités et ratiocinations, Pessoa est grand

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conscience, Fernando Pessoa, nullité, regard d'autrui

Troisième et dernier extrait du Journal lucide, un des textes qui compose le Livre de l’intranquillité.

Il faut une bonne dose de courage intellectuel pour reconnaître hardiment qu’on n’est qu’une loque humaine, un avorton se survivant à lui-même, un dément se situant encore en deçà des limites de l’internement ; mais il faut un courage de l’esprit encore plus grand pour, ayant reconnu tous ces faits, s’adapter parfaitement à son sort, accepter sans révolte ni résignation, sans aucun geste, ni l’ombre d’un geste, la malédiction organique que la Nature lui a imposée. Demander à un tel être de ne pas souffrir serait trop demander, car accepter un malheur vu clairement, et le qualifier de bonheur, voila qui dépasse les forces humaines , mais si on l’accepte en tant que malheur, alors il est impossible de ne pas en souffrir.

Me concevoir moi-même du dehors a causé ma perte — la perte de ma joie de vivre. Me voyant tel que me voient les autres, je me suis méprisé — non parce que je voyais en moi des traits de caractère justifiant ce mépris, mais parce que j’ai commencé à me voir avec les yeux des autres, et à éprouver cette espèce de mépris qu’ils éprouvent à mon égard. J’ai ressenti l’humiliation de me connaître. Comme ce calvaire ne connaît ni grandeur, ni résurrection au bout de quelques jours, je n’ai rien pu faire d’autre qu’endurer ce qu’il avait d’ignoble.

J’ai compris clairement qu’il était impossible à quiconque de m’aimer, à moins de manquer totalement de sens esthétique — et quel serait alors mon mépris ; et que même la sympathie à mon égard ne pouvait résulter que d’un caprice de l’indifférence d’autrui.

*

En commentant le passage cité précédemment, j’avais souligné que Pessoa n’exploitait pas les opportunités de prise de posture aristocratique qu’offre la figure de l’incompris. Dans ce nouvel extrait c’est une autre ressource qui est exploitée : c’est dans la prise de conscience de sa nullité  (« reconnaître hardiment qu’on n’est qu’une loque humaine ») que le narrateur trouve le moyen de se reconnaitre des qualités (« il faut une bonne dose de courage intellectuel »). Ce dernier point peut être mis en contraste avec les passage précédemment cité où le narrateur déplorait de ne pas atteindre cette « distinction de l’esprit qui permettrait à l’isolement d’être, simplement, un repos sans angoisse ».

L’idée que la conscience de notre misère est notre seule voie d’accès à la grandeur est assez connue depuis Pascal :

« La grandeur de l’homme est grande en ce qu’il se connaît misérable. […] C’est donc être misérable que de se connaître misérable ; mais c’est être grand que de connaître qu’on est misérable. »

Pensées, Brunschvicg 558

Mais il est assez connu aussi qu’elle nous fait entrer dans la dialectique de la mauvaise foi et de l’authenticité, car l’apparente victoire sur l’amour propre risque toujours de se révéler n’être qu’une ruse de l’amour propre. La suspicion à cet égard est exprimée par un aphorisme fameux de Nietzsche :

« Celui qui se méprise lui-même se prise tout de même de se mépriser ».

Se méprise-t-on jamais authentiquement si on peut toujours soupçonner ce mépris de soi d’être un moyen de se priser d’avantage (notamment par comparaison avec les autres qui sont si peu lucides sur leur nullité!).

Dans le premier extrait du Journal lucide que j’avais cité, cette question de l’authenticité et de la mauvaise foi affleurait déjà. L’analyse en est compliquée par le fait que le narrateur dont on peut interroger la bonne foi est lui même un personnage (Bernardo Soares) à travers lequel l’auteur (Fernando Pessoa) s’exprime mais avec lequel il joue aussi. Je reviendrai sur cette question à partir d’autres extraits.

*

Il est tentant de mettre le deuxième paragraphe de notre extrait en relation avec un autre thème sartrien  : l’idée que « se concevoir du dehors » – ce qui est la condition pour l’élever de la simple conscience de soi à la connaissance de soi – aurait valeur d’humiliation  (« J’ai ressenti l’humiliation de me connaître »).  Ce rapprochement a cependant ses limites. Chez Sartre se concevoir du dehors c’est, pour tout sujet, déchoir de la position de pur sujet et devenir objet sous le regard autrui ( quel que soit l’autrui considéré, si l’on peut dire). Comme on l’avait noté à propos de l’extrait précédent, le Journal lucide ne se situe pas sur le terrain d’une description des structures de la condition humaine en général, mais sur celui de la description d’une expérience singulière.

Comme ce thème du « regard extérieur » est présent dans d’autres textes  du Livre de l’intranquillité, j’aurai l’occasion d’y revenir.

*

Je ferai sur le dernier paragraphe de notre extrait les mêmes commentaires qu’à propos du premier extrait du Journal lucide : la formulation est frappante à souhait, on ne peut qu’en admirer la perfection, mais, en même temps, on ne peut s’empêcher de soupçonner le côté surjoué : comme si la mauvaise foi se dénonçait comme telle.

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