• À propos

Pater Taciturnus

~ "Ton péché originel c'est d'ouvrir la bouche. Tant que tu écoutes tu restes sans tache"

Pater Taciturnus

Archives de Tag: Benjamin Fondane

Extinction des feux

19 samedi Nov 2016

Posted by patertaciturnus in Divers vers

≈ Poster un commentaire

Étiquettes

amours mortes, Benjamin Fondane, correspondance

Lettre non envoyée

Je t’écris. Est-il rien qui soit changé au monde ?
Tu m’écris. Nous avons l’un et l’autre si peur
de nous apercevoir qu’il neige dans nos cœurs
et que nous sommes morts l’un vis à vis de l’autre.

je suis mort peu à peu et sans m’en rendre compte.
Tu es morte petit à petit sans crier.
La chaleur, par degrés, a fui notre courrier ;
et la rose a déjà cédé au perce-neige.

Parfois je me souviens que tu étais jolie.
Te souviens -tu encor que j’étais âpre et frais?
Mais oui! car nous avons gardé les mêmes traits ;
le temps ne marque plus les heures de l’absence.

[…]

Chaque jour qui s’en va t’efface davantage
en moi. Ne pleure pas! Tu pars, mais c’est des trous
qui restent, là, au mur, où sont rouillés les clous ;
et quand tu t’en iras, entière, de mon être

rien ne subsistera qu’une passoire où l’eau
naïve chante. Hé oui, en moi, tu sers morte –
ma chère. Morte dans un mort! Et de la sorte
nous serons côte à côte, comme toujours absents.

Je t’écris. Comprends-tu! Je n’ai rien à te dire.
Pourtant je me cramponne à toi, ô toi qui es
le glacier qui dans l’eau engendre son reflet
– un reflet qui serait, quoi? à défaut de l’image.

Benjamin Fondane, Au temps du poème

Espoir d’une erreur

21 vendredi Oct 2016

Posted by patertaciturnus in Divers vers

≈ Poster un commentaire

Étiquettes

Benjamin Fondane, solitude

Aucune importance, bien sûr,
que je fusse dans la rue, dans un ventre,
ou dans l’oeil mort de cette chambre,
seul dans l’aquarium du monde,
attendant quelque chose que je savais déjà
impossible, impossible,
et pourtant souhaité au delà du possible,
un visage, une main,
une sonnette prise soudain de tremblement,
un bruit de pas, de voix montant dans le silence
comme la crue houleuse d’une rivière en mars
– terrible, violente !
– … Mais est-ce donc si important,
cela fera-t-il une date,
un digne événement de l’Histoire moderne,
si quelqu’un se trompait d’escalier, de porte,
et apportait, ne fût-ce que pour un rien de temps,
une poignée d’odeur humaine
à ce gardien de phare quasi fou de terreur?

Benjamin Fondane, Ulysse, XXII

Clandestinité et sacralité

22 jeudi Sep 2016

Posted by patertaciturnus in Lectures

≈ 1 Commentaire

Étiquettes

Benjamin Fondane, poésie

Benjamin Fondane a composé en 1934 l’essentiel des poèmes du recueil L’exode, sans franchir le pas de la publication. Il ajoute au recueil une Préface en prose en 1942 puis une section intitulée Intermède écrite en 42-43 qui est une évocation bouleversante de la débâcle de 1940. Il adjoint enfin une postface qui, après quelques indications sur la composition du texte, évoque le contexte dans lequel le poète envisage la diffusion de ce recueil :

« Le temps n’est pas à l’imprimé. la poésie cherche des amis, non du public. Ainsi peut-être au moyen du clandestin, retrouvera-t-elle son caractère sacré, son auditoire ésotérique. A condition, bien entendu, que le lecteur, qui est un confident, tienne de son devoir d’ébruiter le secret et, pour cela, se donne la peine de recopier ou de faire recopier le manuscrit matrice.

La poésie sera pour quelques uns – ou ne sera plus du tout. »

Issue condamnée

14 mercredi Sep 2016

Posted by patertaciturnus in Divers vers

≈ Poster un commentaire

Étiquettes

Benjamin Fondane, solitude

[…]

Et je pense à l’effroi de ma propre existence
à la fuite éperdue qui me ramène à moi,
à ce goût du voyage dont je reviens plus pauvre
à cette soif des hommes dont je reviens gelé …
pardonnez-moi mes frères de vous avoir cherchés
avec un cœur sans foi, avec des mains gercées,
j’ai crié avec vous, j’ai pleuré avec vous
– que ne puis-je arriver à croire à votre vie?

[…]

Benjamin Fondane, Titanic, XII

Toujours quelque chose qui cloche

26 vendredi Août 2016

Posted by patertaciturnus in Divers vers

≈ Poster un commentaire

Étiquettes

Benjamin Fondane, Joie

AIN
Ne puis-je obtenir une Joie
où ne s’égoutte une rancœur,
et pas une seule Raison
qui n’ait un viscère malade ?
Et ne puis-je toucher un marbre
où dort une vierge défaite
sans que la vie ne se hérisse
de mille désordres mortels ?

Benjamin Fondane, L’exode

Personnage vs personnalité de l’acteur ?

12 vendredi Août 2016

Posted by patertaciturnus in Divers vers, Perplexités et ratiocinations

≈ 1 Commentaire

Étiquettes

acteur, Benjamin Fondane, destin, Epictète, liberté, métaphore

Préface

Il y avait longtemps
que le spectacle était commencé de l’Histoire
on en avait déjà oublié les débuts
les origines fabuleuses,
quand je suis né au monde
au milieu de l’Intrigue
comme un événement prévu depuis toujours
et cependant comme une surprise
un personnage inquiétant
qui pouvait tout laisser en place, qui pouvait tout changer,
le sens de l’action, la trame des mobiles,
qui avait sur le texte établi de toujours
l’ascendant prodigieux, étrange du vivant
le droit de bafouiller les meilleures répliques
d’improviser un monde en marge de l’auteur
et tout d’un coup malgré le Plan,
s’introduire soi-même au sein du personnage
en criant, excédé, vers le public des loges
« Il n’y a pas assez de réel pour ma soif ! »

Benjamin Fondane, Ulysse,
in Le mal des fantômes, Verdier poche, p. 21

*

acteur

Source de l’image

La métaphore que Benjamin Fondane file à travers ce texte évoque cet extrait fameux du Manuel où Epictète utilise une analogie avec la relation entre auteur et acteur pour signifier ce qu’il en est de notre liberté envers le destin.

« Souviens-toi que tu es comme un acteur dans le rôle que l’auteur dramatique a voulu te donner : court, s’il est court ; long, s’il est long. S’il veut que tu joues un rôle de mendiant, joue-le encore convenablement. Fais de même pour un rôle de boiteux, de magistrat, de simple particulier. Il dépend de toi, en effet, de bien jouer le personnage qui t’est donné ; mais le choisir appartient à un autre. »

Epictète, Manuel, XVII

Benjamin Fondane étant aussi philosophe, il est très peu probable que cette proximité soit le fruit du hasard. Mais si Fondane reprend à son compte l’analogie proposée par Epictète, on constate qu’il en détourne le sens puisque, pour Epictète, il ne saurait être question d' »improviser un monde en marge de l’auteur » (ce ne peut être qu’une illusion). Mais ce détournement de  sens est rendu possible par une faille de l’analogie proposée par le stoïcien : en effet, s’il est vraiment en notre pouvoir de jouer bien ou mal (« bredouiller les meilleurs répliques ») le rôle qui nous est assigné par l’Auteur, comment nous refuser le pouvoir d’improviser? Et inversement, si nous n’avons aucune marge d’improvisation, ne sommes nous pas plutôt des pantins dont le Marionnettiste (qui détermine la manière de jouer) serait aussi l’Auteur de l’Intrigue? Pour le stoïcien, l’acteur  (l’homme) accompli est celui qui joue bien le rôle qui lui est assigné, ce qui signifie qu’il accepte ce rôle quel qu’il soit, au lieu de rechigner et de le jouer à contre-coeur. Pour Fondane en revanche, il semble que  pour s’accomplir, l’acteur doive « s’introduire dans le personnage » et improviser « en marge de l’auteur », comme s’il s’agissait de subvertir le rôle en l’investissant de sa personnalité. On notera que, pour détourner le sens de l’analogie, Fondane exploite également un aspect du comparant qui restait sans emploi chez Epictète : en effet, qui dit spectacle dit « public des loges ». En s’adressant à ce public en tant qu’acteur et en lui exprimant son insatisfaction (alors que l’acteur stoïcien se satisfait de son rôle), l’acteur, dans le poème de Fondane, affirme son autonomie par rapport à son personnage. Mais, demandera-t-on, qui compose le public  ? Il est vrai que l’on voit mal quels autres spectateurs cette pièce pourrait avoir que son auteur et ses acteurs mêmes.

Se retourner dans sa tombe

02 samedi Juil 2016

Posted by patertaciturnus in Divers vers

≈ Poster un commentaire

Étiquettes

Benjamin Fondane, mort

Aleph
Si toute chose a un commencement
s’il faut que toute chose meure,
dis-moi alors : pourquoi le morts
se retournent dans leurs cercueils?

Benjamin Fondane, L’exode

*

J’avais déjà cité un poème de Jaume Mesquida évoquant le thème de la position des cadavres … voilà de quoi commencer une anthologie à ce sujet.

Articles Plus Récents →

Archives

  • août 2022 (9)
  • juillet 2022 (28)
  • juin 2022 (19)
  • mai 2022 (20)
  • avril 2022 (23)
  • mars 2022 (27)
  • février 2022 (29)
  • janvier 2022 (31)
  • décembre 2021 (25)
  • novembre 2021 (21)
  • octobre 2021 (26)
  • septembre 2021 (30)
  • août 2021 (24)
  • juillet 2021 (28)
  • juin 2021 (24)
  • mai 2021 (31)
  • avril 2021 (16)
  • mars 2021 (7)
  • février 2021 (6)
  • janvier 2021 (13)
  • décembre 2020 (11)
  • novembre 2020 (3)
  • octobre 2020 (3)
  • septembre 2020 (9)
  • août 2020 (18)
  • juillet 2020 (16)
  • juin 2020 (8)
  • mai 2020 (20)
  • avril 2020 (8)
  • mars 2020 (11)
  • février 2020 (18)
  • janvier 2020 (26)
  • décembre 2019 (21)
  • novembre 2019 (25)
  • octobre 2019 (26)
  • septembre 2019 (31)
  • août 2019 (27)
  • juillet 2019 (23)
  • juin 2019 (22)
  • mai 2019 (22)
  • avril 2019 (27)
  • mars 2019 (27)
  • février 2019 (24)
  • janvier 2019 (32)
  • décembre 2018 (13)
  • novembre 2018 (9)
  • octobre 2018 (12)
  • septembre 2018 (9)
  • août 2018 (13)
  • juillet 2018 (9)
  • juin 2018 (8)
  • mai 2018 (21)
  • avril 2018 (25)
  • mars 2018 (26)
  • février 2018 (22)
  • janvier 2018 (27)
  • décembre 2017 (24)
  • novembre 2017 (16)
  • octobre 2017 (19)
  • septembre 2017 (18)
  • août 2017 (21)
  • juillet 2017 (18)
  • juin 2017 (21)
  • mai 2017 (14)
  • avril 2017 (22)
  • mars 2017 (30)
  • février 2017 (12)
  • janvier 2017 (13)
  • décembre 2016 (14)
  • novembre 2016 (15)
  • octobre 2016 (22)
  • septembre 2016 (16)
  • août 2016 (24)
  • juillet 2016 (19)
  • juin 2016 (16)
  • mai 2016 (20)
  • avril 2016 (10)
  • mars 2016 (30)
  • février 2016 (28)
  • janvier 2016 (32)
  • décembre 2015 (27)
  • novembre 2015 (28)
  • octobre 2015 (31)
  • septembre 2015 (30)
  • août 2015 (33)
  • juillet 2015 (32)
  • juin 2015 (33)
  • mai 2015 (34)
  • avril 2015 (31)
  • mars 2015 (35)
  • février 2015 (32)
  • janvier 2015 (33)
  • décembre 2014 (37)
  • novembre 2014 (33)
  • octobre 2014 (33)
  • septembre 2014 (33)
  • août 2014 (33)
  • juillet 2014 (33)
  • juin 2014 (35)
  • mai 2014 (35)
  • avril 2014 (35)
  • mars 2014 (35)
  • février 2014 (30)
  • janvier 2014 (40)

Catégories

  • 7e art
  • Célébrations
  • Choses vues ou entendues
    • confession
    • Mon métier ma passion
  • Divers vers
  • Fantaisie
    • devinette
    • Philémon et Anatole
    • Taciturnus toujours au top
    • Tentatives de dialogues
  • Food for thought
    • Aphorisme du jour
    • Pessoa est grand
  • Insatiable quête de savoir
    • Il suffirait de quelques liens
  • Lectures
  • Mysticismes
  • Non classé
  • Paroles et musiques
    • Au chant de l'alouette
    • Berceuse du mardi
    • Bienvenue aux visiteurs
  • Père castor
  • Perplexités et ratiocinations
  • SIWOTI or elsewhere

Tags

Abel Bonnard alouette amitié amour art Auguste Comte Benjamin Fondane Bertrand Russell bonheur Cesare Pavese correspondance culture Dieu Djalâl ad-Dîn Rûmî Dostoievski Edmond Jabès Elias Canetti Emily Dickinson enseigner et apprendre esthétique Fernando Pessoa Friedrich von Schiller féminisme Gabriel Yacoub Goethe Hegel Hugo von Hofmannstahl humiliation Hâfez de Chiraz Ito Naga Jean-Jacques Rousseau Joseph Joubert Karen Blixen Karl Kraus Kierkegaard Kobayashi Issa Lichtenberg lune Malek Haddad Marina Tsvetaieva Marshall Sahlins mort Mário de Sá-Carneiro Nietzsche Nâzım Hikmet Omar Khayyâm Paul Eluard Paul Valéry perfection et imperfection Philippe Jaccottet philosophie Pier Paolo Pasolini Pierre Reverdy poésie profondeur racisme Ramón Gómez de la Serna Reiner Kunze religion rêve Simone Weil solitude souffrance Stefan George stoïcisme stupidité travail universalisme Urabe Kenkô utilitarisme vertu vie vérité Witold Gombrowicz éthique et esthétique

Propulsé par WordPress.com.

Confidentialité & Cookies : Ce site utilise des cookies. En continuant à utiliser ce site, vous acceptez leur utilisation.
Pour en savoir davantage, y compris comment contrôler les cookies, voir : Politique relative aux cookies
  • Suivre Abonné
    • Pater Taciturnus
    • Rejoignez 64 autres abonnés
    • Vous disposez déjà dʼun compte WordPress ? Connectez-vous maintenant.
    • Pater Taciturnus
    • Personnaliser
    • Suivre Abonné
    • S’inscrire
    • Connexion
    • Signaler ce contenu
    • Voir le site dans le Lecteur
    • Gérer les abonnements
    • Réduire cette barre
 

Chargement des commentaires…