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Pater Taciturnus

~ "Ton péché originel c'est d'ouvrir la bouche. Tant que tu écoutes tu restes sans tache"

Pater Taciturnus

Archives de Tag: Augustin

Natures méfiantes envers la nature

02 samedi Juil 2022

Posted by patertaciturnus in Lectures

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Augustin, Czeslaw Milosz, Simone Weil, William Blake

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« Ce qui importe, c’est qu’il existe, incontestablement, un tempérament manichéen, doué pour souffrir les tourments de son amour-propre blessé, mais capable en même temps de porter sur eux un jugement sévère ; il n’est pas exclu, par ailleurs, que ce tempérament n’éprouve un certain soulagement à étendre le principe du mal à l’existence en général, et il a certainement contribué, plus que les influences de l’Inde et de la Perse, à faire naître — et durer — au sein du christianisme, un certain type d’hérésies. Cela ne signifie pas, toutefois, qu’on comptait au nombre des hérétiques tous les individus dotés d’un tel tempérament : saint Augustin était le même homme lorsqu’il appartenait à l’Église manichéenne et, plus tard, lorsqu’il se soumit à l’orthodoxie chrétienne. Le trait commun à tous ces gens est leur méfiance envers la Nature, la nature humaine et le monde physique. En les mettant en avant, je me laisse tout simplement guider par l’expérience, car j’ai découvert successivement des écrivains qui présentaient de nombreux points communs. Ainsi : saint Augustin (les Confessions); Pascal (il est difficile de soupçonner les jansénistes de complaisance à l’égard de la Nature) ; Simone Weil (manifestement proche, dans beaucoup de ses pensées, des cathares ou des albigeois) ; William Blake (qualifié par certains, non sans raison, de gnostique) ; Léon Chestov (dont toute la philosophie repose sur une protestation contre les Lois de la Nature —bien que lui restât hostile à la gnose). J’use ici de raccourcis, non autorisés peut-être, mais tu voudras bien, lecteur, me les pardonner, car je crains de tomber dans l’érudition. »

Czeslaw Milosz, L’immoralité de l’art, p. 22

Jésus, dialecticien et ironiste ?

08 lundi Fév 2016

Posted by patertaciturnus in Lectures

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Augustin, dialectique, interrogation, ironie, Jean-Louis Chrétien

« D’une façon qui peut de prime abord surprendre par l’insolite rapprochement qu’elle opère entre Athènes et Jérusalem, entre le mots si intensément et proprement grec de dialectique et la vie de Jésus, saint Augustin voit en ce dernier un dialecticien aussi. A propos de l’épisode évangélique du tribut à César, Augustin, répondant au donatiste Cresconius qui attaque éloquence et dialectique écrit : « Où était la dialectique ? Chez ceux qui tendirent les embûches de leur question et tentèrent de l’emporter par la ruse ? Ou bien plutôt chez celui qui, partant de l’interrogation même, en tira par la prudence de son interrogation leur réponse vraie (responsionem eorumprudentia interrogationis eliciens), et les força de confesser d’eux-mêmes la vérité qu’ils pensaient lui faire dire à ses risques et périls? »[1] Le Christ lui même « veut que nous obligions même les ennemis de la vérité , par une interrogation vigilante et des raisons invincibles, à rendre témoignage à la vérité. »[2]

[…]

Enfin il est des interrogations qui sont des actes et des épreuves par elles-mêmes, se dissociant de toutes demandes d’information comme de tout argument dialectique. C’est, pour Augustin, le cas des interrogations que l’Evangile place dans la bouche de Jésus. Sa christologie fait qu’il ne conçoit pas d’ignorance, même empirique, possible pour Jésus. Il y a donc en conséquence une ironie christique, thème au demeurant courant dans la patristique . Augustin cherche, en exégète, à en dégager la portée signifiante selon les divers contextes. Il a interrogé, en effet, comme s’il ignorait ce qu’il savait parfaitement. Et il a feint de ne pas le savoir  pour signifier, par sa prétendue ignorance, une autre chose ; signification qui, parce qu’elle était vraie, n’était assurément pas un mensonge. » [3] C’est une figure.

A propos d’une question du Christ à Philippe, saint Augustin remarque : « Parfois nous interrogeons sur ce que nous ne savons pas dans le désir d’entendre pour apprendre, et parfois nous interrogeons pour savoir si celui que nous interrogeons sait aussi. Mais le Seigneur, lui, savait l’un et l’autre ; il savait ce qu’il demandait, car il connaissait ce qu’il allait faire, et il savait pareillement l’ignorance de Philippe. Pourquoi dès lors, l’interrogeait-il, sinon pour manifester son ignorance? »[4] »

Jean-Louis Chrétien, Saint Augustin et les actes de paroles
PUF Quadrige, p. 21 – 22

[1] Contra Cresconium, I, XVII, 21
[2] Contra Cresconium, I, XVII, 22
[3] Contra mendacium, XII, 27
[4] In Ioh. Ev. tract. XXIV, 4

Rumination

22 vendredi Jan 2016

Posted by patertaciturnus in Lectures

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Augustin, Jean-Louis Chrétien, mémoire, rumination

« Le Lévitique détermine deux critères de pureté pour les animaux terrestres : d’avoir le sabot fourchu ou fendu, d’une part, et de ruminer d’autre part. […] Comme chrétien, Augustin considère que ces prescriptions alimentaires sont, pour sa foi, caduques, et il insiste par ailleurs, contre les manichéens , sur la pureté  et la bonté de toute créature de Dieu. Mais il pense que spirituellement l’opposition entre ceux qui ruminent  et ceux qui ne ruminent pas demeure à jamais pertinente. La rumination, à laquelle le langage courant prête souvent le sens péjoratif de ressassement ou de ressentiment, a pour lui une dimension positive. A quel titre ?

« Le sage rumine, le sot ne rumine pas. Mais cela, en termes clairs et en bon français (latine), qu’est-ce à dire? Le sage considère par la pensée ce qu’il a entendu ; mais le sot livre à l’oubli les paroles ouïes.Ce n’est pour aucune autre raison que dans la Loi, sont dits purs les animaux qui ruminent […] L’agneau signifie l’innocence de la sagesse qui rumine ; le porc signifie l’impureté de la sottise qui oublie. » […] Le Contra Faustum précise cette opposition entre la « pureté de la rumination » et l' »impureté de la non-rumination ». Il y en qui, « bien qu’ils écoutent volontiers les paroles de la sagesse, par la suite n’y pensent plus du tout ». En sens inverse, « ce que l’on a entendu d’utile, le rappeler, dans la douceur du souvenir, comme des entrailles de la mémoire jusqu’à la bouche de la pensée (os cogitationis), qu’est-ce d’autre que, d’une certaine façon, ruminer spirituellement? ».

La rumination de la parole est donc l’avenir de l’écoute : elle ne forme pas une simple conservation ou fixation, elle permet à ce que nous avons entendu de devenir nôtre, de ne cesser de devenir nôtre. Telle est son importance , qui en fait bien plus qu’une image de rencontre. »

Jean-Louis Chrétien, Saint Augustin et les actes de paroles, PUF Quadrige p. 51 – 52

Éducation bienveillante? (2)

03 mercredi Déc 2014

Posted by patertaciturnus in Food for thought

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Augustin, éducation bienveillante

Ernst_Max-vierge_corrigeant

 » La différence d’intention a fait la différence d’action. L’acte était un ; mais si nous pesons la diversité des intentions qui l’ont produit, nous l’aimerons sous un rapport, et, sous l’autre, nous le condamnerons : nous le glorifierons sous un point de vue ; sous l’autre, nous le détesterons. Tant vaut la charité ! Remarquez-le, elle seule établit une différence entre les actions humaines; elle seule les distingue les unes des autres.
Ce que nous venons de dire s’applique à des actions de même nature. S’il s’agit d’actions de nature différente, nous reconnaîtrons, par exemple, que la charité rend un homme sévère, et que l’iniquité en rend un autre flatteur. Un père frappe son enfant, un corrupteur l’approuve. A ne considérer que les coups et les flatteries, où est celui qui ne recherchera pas les caresses et n’évitera pas les coups ? Mais considère les personnes et, tu le verras, les coups sont l’effet de la charité, et les flatteries celui de l’iniquité. Faites bien attention à ceci : les actions humaines se discernent les unes des autres par le principe de la charité. Beaucoup peuvent se faire, qui aient les apparences de la bonté et qui, néanmoins, ne soient pas le fruit de la charité. Les épines mêmes ne fleurissent-elles pas ? Certains actes, au contraire, semblent durs et cruels, qui se font, par motif de charité, pour le règlement des mœurs. Une fois pour toutes, on t’impose un précepte facile : Aime, et fais ce que tu voudras. Soit que tu gardes le silence, garde-le par amour; soit que tu cries, élève la voix par amour ; soit que tu corriges autrui, corrige-le par amour ; soit que tu uses d’indulgence, sois indulgent par amour; aie dans le cœur la racine de l’amour, et de cette racine il ne pourra rien sortir que de bon. »

Saint Augustin, 7e Traité sur l’Epitre de Saint Jean aux Parthes

Bonheur conjugal

02 jeudi Oct 2014

Posted by patertaciturnus in Lectures

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amour, anniversaire, Augustin

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Adam et Eve au Palais du Tau à Reims (source)

Mes lecteurs étant d’une grande culture, ils connaissent tous la fameuse sentence  : « aimer ce n’est point nous regarder l’un l’autre mais regarder ensemble dans la même direction ». Ils n’ignorent vraisemblablement pas qu’elle a pour auteur Antoine de Saint Exupéry (pour ma part, je m’étais sottement mis en tête qu’elle était de Jean Guitton …) et qu’elle est tirée de Terre des hommes. A n’en pas douter, ils connaissent aussi les détournements de plus ou moins bon goût dont elle a fait l’objet. En revanche peut-être ignorent-ils ce qui me semble être la source oubliée de ce topos.

« La première de toutes les alliances naturelles de la société humaine est celle de l’homme et de la femme, que Dieu n’a pas même voulu former séparément  pour les unir après ensemble comme deux personnes étrangères, mais il a tiré l’une de l’autre, nous marquant encore dans le côté d’où la femme fut tirée quelle devait être la fermeté de cette union (Gen. II, 21). Car c’est par les côtés que ceux qui marchent ensemble d’un pas égal sont joints l’un à l’autre, et ils regardent de même, l’un comme l’autre, le lieu où ils vont. »

Augustin, Le bonheur conjugal,
trad. Jean Hamon, Rivage p. 37

 

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